Jean Konan Banny.
Ces rajouts comme le style parfois incohérent - il s’adresse, par exemple, au Président en employant indifféremment la troisième personne du singulier ou la deuxième du pluriel, on trouve des bouts de phrases entre deux idées et qui devaient être sans doute développées, le masochisme poussé jusqu’à l’invraisemblable, etc. - sembleraient prouver, pour le moins, l’absence d’une réelle spontanéité.
Quand au contenu de la « confession », son caractère criminel se réduit à une affaire de maraboutage. On n’y trouve aucune trace d’un recours au poison par exemple.
A ma connaissance, Mgr Yago, archevêque d’Abidjan, fut le seul à prendre publiquement position : en tenant à s’incliner devant la dépouille de Boka, il indiquait implicitement qu’il ne croyait guère à la thèse du suicide. En me relatant l’incident, le Président ne cachera pas son courroux et le traitera, une fois de plus, de « fétichiste en tiare ».
L’affaire, avec son environnement fétichiste, cause un émoi considérable en France. La presse de gauche et de droite, par idéologie ou par cartiérisme, tire à boulets rouges sur le président Houphouët-Boigny et son régime. Le professeur Lavaud met en doute publiquement les histoires de « fétiches et de flacons de philtres » et refuse d’admettre, dit-il, « la vraisemblance des accusations portées contre lui et des circonstances de sa mort ».
Première riposte, celle de M. M’ Bahia Blé, ministre ivoirien des Forces Armées. Dans une lettre à M. Lavaud avec copie adressée au Monde [67], il dit connaître Boka mieux que quiconque puisqu’il fut son condisciple à l’école primaire, et confirme la thèse officielle.
Deuxième phase de la riposte, le président Houphouët-Boigny me demande, au terme de notre entrevue, fin mai 1964, dans sa villa, d’intervenir à mon retour à Paris auprès de M. Roger Perriard, un de ses conseillers français, pour que lui aussi réponde au professeur Lavaud. Son raisonnement, le voici : si un Blanc se réclamant de plus de sa vieille amitié avec le défunt, défend la thèse du suicide et son halo maraboutique, il y a plus de chances de mettre un terme à la campagne de dénigrement de la Côte d’Ivoire.
Roger Perriard était un ami. J’essaie de lui éviter cette sinistre corvée. Je fais donc valoir au Président que sa qualité de membre du Cabinet présidentiel rendra son témoignage plus que suspect. « Sa double qualité de Blanc et d’ami de Boka, me répond-il,
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