Houphouët-Boigny saluait le XIIe congrès du Parti communiste au nom du R.D.A. L’Humanité du 5 avril publiait sa photo en première page, et lui, du haut de la tribune exprimait « à Maurice Thorez l’affectueuse sympathie et la gratitude des Africains en lutte pour l’émancipation sociale et humaine ». Il déclarait alors devant les délégués communistes :
« Vous n’êtes pas de ceux qui proclament du bout des lèvres la fraternité, tout en maintenant l’oppression colonialiste. C’est ce qui justifie la confiance grandissante des peuples coloniaux dans votre grand Parti… Nous savons, avait-il relevé, comment l’Union soviétique a résolu la guerre coloniale et nationale, nous nous dressons contre la préparation de la guerre contre l’Union soviétique… Les répressions sanglantes n’ont pas réussi et ne réussiront pas à abattre la belle combativité des Africains pour la paix et la liberté ».
Quatre phrases extraites de son allocution, quatre contradictions.
Il félicite le P.C.F d’harmoniser ses paroles et ses actes ; lui ne le fait pas puisque, en dépit des paroles flatteuses adressées au Parti communiste, il s’apprête à le lâcher. Il proclame la confiance des peuples coloniaux dans l’action des communistes français ; lui le président du grand mouvement populaire d’Afrique francophone, semble peu convaincu de la justesse de ce concept, puisqu’il se prépare déjà à virer de bord. L’Union soviétique ? En pleine guerre froide, lui, rejoindra très bientôt le « camp impérialiste ». Impact nul de la répression sur la combativité des Africains ? Son visage même prouvera en soi le contraire.
Une fois de plus, on se retrouve devant une énigme : Est-ce Janus ? Doit-on opter ouvertement pour le double jeu et croire qu’il avait fait sienne la maxime favorite de Louis XI « qui nescit dissimulare nescit regnare » [75] ? Agit-il au coup par coup ?
De toutes façons, contrairement aux dires de son hagiographe, le gouverneur Siriex, M. Houphouët-Boigny n’apparaît nullement sous le jour de la blanche colombe tombée par mégarde entre les griffes du P.C.F. Le leader ivoirien a bel et bien collaboré avec le Parti communiste sur le plan idéologique comme sur le plan organisationnel et politique, en Côte d’Ivoire, comme en France et sur le plan international à travers le mouvement de la paix. Mais il l’a fait à bon escient, dans l’intérêt de sa classe, pour assurer la mainmise des gros planteurs sur les masses, pour assurer son leadership.
Vingt-sept ans plus tard,
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