informé ».
L’administrateur colonial en arrive enfin au contenu politique de ce problème au moment où le Syndicat Agricole Africain [22] a près d’un an d’âge, et à la veille de l’apparition du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire sur l’échiquier ivoirien. Les Mossis, « les plus dociles, les plus raisonnables, les plus soumis », affirme-t-il, « sont devenus réceptifs à n’importe quelle propagande subversive » [23].
Donc, non seulement le travail forcé ruine la colonie au profit de la Gold Coast, apparaît anachronique au lendemain de la libération de la France du joug nazi, altère l’image de la France face à la grande alliée d’outre-Atlantique, mais de plus, crée une masse de manœuvre potentielle disponible pour d’éventuels agitateurs.
Que pensent les planteurs ivoiriens de cette analyse lucide des implications du travail forcé ? Quelle est leur attitude face à ce plan ?
Il convient de distinguer deux périodes.
La première s’étend de la naissance d’une couche de planteurs au régime de Vichy ; à ce moment, le travail forcé ne leur pose nul problème économique et à fortiori moral. Comme le précisera, sans réticence aucune, le député Félix Houphouët-Boigny, en 1950, à propos des requis pour le travail forcé, « nous payions aussi 3,50 F par jour, comme certains métropolitains ». Il va même plus loin et admet ouvertement l’existence d’un travail absolument non rétribué en faveur des chefs [24].
La seconde période, qui commence avec la défaite de la France, verra la position des planteurs africains changer du tout au tout ; ils se trouvent privés, sciemment, de main-d’œuvre. Pourquoi ? Parce que « du fait des difficultés de moyens de transport, déclarera M. Houphouët, les métropolitains ne pouvaient plus se rendre en Haute Côte pour recruter de la main-d’œuvre. Ainsi, toute la main-d’œuvre était fournie par la zone moyenne de la Côte d’Ivoire, zone productrice de café, de cacao et de kola ».
Or, la main-d’œuvre provenant de cette région s’avérait peu abondante puisque, suivant l’exemple des Mossis, les Baoulés, les Sénoufos, les Gouros, les Bétés, de la Moyenne et de la Haute Côte d’Ivoire passaient, eux aussi, en