première « Lettre ouverte » publiée dans L’A.O.F. du 7 juillet 1952, il rapporte avoir demandé au leader ivoirien deux ans plus tôt : « Si tu avais quelque crainte pour ta sécurité personnelle. Tu éludas ma question… », précise-t-il. Dans sa “Deuxième Lettre Ouverte”, datée de septembre 1952, il écrit brutalement :
« … En matière d’honnêteté, de courage moral ou physique, vous feriez bien Houphouët, de montrer un peu plus de modestie » [14].
Il revient à la charge, se fait plus précis, pour affirmer :
« Certes Houphouët, votre responsabilité est grande mais je sais quelles méthodes ont pu être employées pour vous amener à changer de position… Mais oui, Houphouët, je vous ai déjà demandé non pas une fois mais plusieurs fois depuis février 1950 jusqu’en juin 1951 si vous craigniez pour votre sécurité personnelle. Et quant [sic] à avoir peur, ceci peut arriver à tout le monde ; vous êtes médecin et vous savez bien qu’une dépression nerveuse est toujours possible. »
Dans sa réponse à la première « Lettre Ouverte », Félix Houphouët-Boigny se défend - en caractères majuscules et gras dans le texte [15] - d’avoir eu peur [16]. Et pourtant il y aurait eu de quoi.
Durant les derniers de janvier 1950, le juge d’instruction, M. Pautrat, n’essayait-il pas de le mettre en état d’arrestation « au nom de la loi » ? Au même moment, le procureur Delamotte ne menaçait-il pas de « raser Yamoussoukro » ? Le gouverneur ne demandait-il pas la levée de son immunité parlementaire ? Et ne se rappelle-t-il pas, lui, Houphouët, les suites d’une mesure similaire contre ses collègues malgaches ? M. Montel, le commandant du Cercle de Dimbokro, n’a-t-il pas eu l’audace de menacer Me Matarasso - une femme, une blanche, une Française, une avocate - au moins de lui « botter les fesses » ? La haine vengeresse de ses ennemis ne lui faisait-elle pas craindre d’être arrêté, en dépit de son immunité, même à Paris ? Raphaël Saller, principal négociateur français du virage de Félix Houphouët-Boigny, ne nourrissait-il pas la même crainte ? Le président du Conseil, M. René Pleven