La victoire de Péchoux
Leur mouvement enveloppant - esquissé lors des « États généraux de la colonisation » - ayant échoué, la « volonté manifeste des colons de briser toute résistance chez les Africains », comme le dira M. Houphouët-Boigny, ne se trouve nullement émoussée. Profondément conscients de leurs intérêts, décidés à se battre pour la préservation de leurs privilèges, les colons multiplieront les assauts au nom de la France et tricolore au poing.
Ils croient à leur bon droit. En janvier 1944 au Maroc, et en mai 1945 en Algérie, n’avait-on pas mâté les indigènes à coup de bombes, d’obus, de balles ? Leurs collègues d’Indochine, épaulés par un corps expéditionnaire, ne défendent-ils pas, depuis décembre 1946, à travers leurs piastres, la pérennité de la présence française ? Leurs confrères de Madagascar n’essaient-ils pas, depuis mars 1947 - cela coûtera certes quelques malgaches tués - de faire de même ? Pourquoi donc s’opposer en Côte d’Ivoire à une solution similaire ?
Les colons poussent à la roue. Le gouverneur Orselli en témoignera plus tard, des forestiers français invités à sa table lui avaient dit : « La situation ne peut s’arranger ici qu’avec 10 000 morts. » Et celui qui fut gouverneur de la Côte d’Ivoire de février à novembre 1948 ajoutera :
« Je protestai, mais voyant que tout le monde était de cet avis-là, je n’ai pas insisté » [1].
Au demeurant, M. Coste-Fleuret, ministre de tutelle de M. Orselli, lui montrera l’étendue de sa communion de pensée avec les colons, en lui indiquant comme unique objectif de sa mission : « Vous allez là-bas pour supprimer le R.D.A. » Communion de pensée avec le chef de cabinet du ministre qui lui conseillera, à lui, représentant de la République Française en Côte d’Ivoire, « de suivre les instructions MM. Rucart et Laragosse » [2], les deux champions les plus extrémistes du colonat.
Cet arrière-plan de répression coloniale généralisée - auquel il convient d’ajouter le blocus de Berlin, le coup de