dit-il, que son « jeune frère Sékou Touré... ait pu tenir de tels propos », et en cas de confirmation, ajoute-il, « je ferai une mise au point. »
Effectivement, le vendredi 28 mai 1965, je suis convoqué au Palais, et le président Houphouët-Boigny prépare avec moi le texte de sa réponse. Mais le leader ivoirien changera d’idée : c’est le président de la République de Haute-Volta qui sera chargé de transmettre le message par la voie des ondes. La lecture du texte intégral de la causerie radiodiffusée de M. Maurice Yaméogo du 2 juin 1965, met en relief l’introduction d’arguments et de termes nouveaux, inhabituels et dépourvus de diplomatie. Ainsi, selon le président Yaméogo, « ... Un homme comme Houphouët, lorsqu’il est insulté, n’a pas le droit de répondre. Son audience... constitue la meilleure réponse aux âneries de ceux qui veulent pourtant être comme lui... Ayez un peu de pudeur, car les Africains sont polis... ».
Pour la première fois, du moins à notre connaissance, les insultes ont ainsi accès à un micro sub-saharien. Parlant à Radio-Conakry, le président Sékou Touré relève l’absence de propos similaires sur les ondes et dans la presse françaises. Il accuse ouvertement ses adversaires d’avoir entravé le rapprochement franco-guinéen et franco-malien, et d’avoir essayé d’humilier certains pays, par France interposée [14].
Quelques jours plus tard, le président Sékou Touré précise sans fard la personne visée. Il accuse nommément le président Houphouët-Boigny de recourir aux « armes du mal », du « venin et [du] cynisme, d’avoir entretenu l’incompréhension » entre la France et la Guinée [15].
De toute évidence, le président Sékou Touré en présentant le Mali et la Guinée comme des victimes des manœuvres du président Houphouët-Boigny, cherche à amener M. Modibo Keita à prendre parti pour lui. Pour y parer, et surtout pour réduire à néant l’effet psychologique des attaques guinéennes sur les auditeurs africains, le président ivoirien invite son collègue malien à venir le rencontrer à Bouaké.
Pourquoi M. Modibo Keita accepte-t-il de se rendre à ce rendez-vous, de se désolidariser ainsi, implicitement, du leader guinéen, de faire le jeu de la Côte d’Ivoire ? Il y est contraint en quelque sorte, car une fois de plus, « les