d’Enugu pourrait être un saut périlleux... »
Le 10 mai, le même journaliste attaque, dans sa rubrique, la solution confédérale proposée par le lieutenant-colonel Ojukwu, car « la région Orientale, c’est-à-dire celle du pétrole, n’attend qu’une telle occasion pour en profiter et se proclamer indépendante. Partout où il y a de l’or, peu importe sa couleur, il y a massacre ».
A ce moment, le président Houphouët-Boigny hésite donc, apparemment, à s’engager dans l’aventure d’une remise en question des frontières héritées du système colonial. Il croit aussi, sans doute, à ce moment, que M. Ojukwu pourra atteindre son double objectif - la sécession et la désintégration consécutive de la Fédération - sans aide ouverte de l’étranger.
Quoi qu’il en soit, les troupes du lieutenant-colonel Ojukwu investissent toutes les installations pétrolières de l’ancienne province orientale - situées notamment dans l’État des Rivières et dans l’État du sud-est - pour forcer les compagnies exploitantes à payer leurs redevances au gouvernement du Biafra.
Lagos riposte en décrétant le blocus.
Les hostilités commencent le 7 juillet et les troupes fédérales remportent quelques maigres succès. Mais bientôt les troupes biafraises passent à leur tour à l’offensive, « libèrent » l’ancien État du Centre-Ouest et pénètrent dans la région à prédominance Yorouba. Le but de M. Ojukwu est évidemment de discréditer le pouvoir fédéral, d’y encourager les forces séparatistes, de les pousser à la sécession, et de parachever ainsi, dans les faits, la désintégration de la Fédération. Effectivement, « le Biafra, proclama-t-il, [est] prêt à aider...à la libération d’autres régions du Nigeria. Il [lance] un appel ouvert à la désertion aux officiers d’origine Yorouba servant dans l’armée nigériane » [13].
Mais dans le camp du lieutenant-colonel Ojukwu, tous les dirigeants ne paraissent pas favorables à la sécession. Ainsi, le général Victor Banjo, auteur du coup d’État du 9 août qui a permis à l’État du Centre-Ouest de se « libérer » et de rallier le Biafra, déclare au micro de la station de radiodiffusion de la capitale de cette région :
« Citoyens nigérians, je suis un Nigérian. Je crois en la nation nigériane et je me bats pour un Nigeria dans lequel aucun peuple ne sera dominé par un autre... dans lequel les divers peuples du Nigeria peuvent vivre ensemble... »<span