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De son côté, le président Houphouët, à la même époque, fait, lui aussi, preuve d’un dynamisme extraordinaire. En dépit des problèmes intérieurs qui l’assaillent, du souci de la préservation de ses intérêts personnels en plein boom des prix du cacao, il se déplace plus que de coutume. Entre janvier et juin, il est à Lomé, à Ouagadougou, à Monrovia, à Paris, à Dakar (pour le 4e sommet franco-africain), à Bruxelles au début du mois de mai. De nouveau à Paris, puis à Genève pour rencontrer M. Voster, enfin à Téhéran.
Sa religion sera faite quant à l’ampleur de la concussion, dira-t-il bientôt, durant l’une de ses visites en Europe. Il semble effectivement qu’il ait été mis "au parfum", soit à Bruxelles - par un concurrent malheureux - soit à Paris par un ou plusieurs concurrents tout aussi malheureux. Le fait est que, quelques jours après son retour en Côte-d’Ivoire, le gouvernement, réuni sous sa présidence, adopte, le 14 mai, un projet de loi punissant de peines sévères les donneurs aussi bien que les receveurs de dessous de table. Chose remarquable, et erreur aux conséquences multiples, le communiqué précise que les bénéficiaires de pots-de-vin peuvent être aussi bien "le Président de la République" que des ministres, des députés, des ambassadeurs, etc.
Le projet de loi restera lettre morte, car le Président hésite toujours
à sévir. Certes, il rappelle dans une interview que "si science sans conscience est la ruine de l’âme, la malhonnêteté tue la compétence, et notre pays, qui a besoin d’aller de l’avant dans la voie du progrès, n’a désormais que faire des malhonnêtes même s’ils sont compétents". Le ton est sévère mais rien ne vient.
L’éditorialiste de Fraternité Matin Du 4.6.1977. attaque "ces voleurs des derniers publics... des voleurs qui ne méritent d’autre considération que celle d’être mis au ban de la Nation, et d’avoir leurs biens confisqués...". Il lui sera demandé de se calmer. Il se calmera.
A ce moment, pour les ministres, hauts fonctionnaires et diplomates étrangers, l’article du quotidien ivoirien visait indubitablement M. Konan Bédié. Mais il se croit à l’abri de toute sanction, voire de tout esclandre.
On voit sa photo, souriant, à la première page du même quotidien, soixante-douze heures avant sa déchéance.
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