sentiment d’insécurité permanente proche de la panique à Conakry.
De fait, à la mi-mars 1968, une dépêche de l’Agence France-Presse transmet le texte d’un communiqué de Conakry annonçant l’arrestation en territoire guinéen, de plusieurs individus, dont « le sieur Barry Yaya, instituteur, secrétaire général de l’organisation à la solde de l’impérialisme international qui s’intitule ridiculement "Front de Libération Nationale" ». Dans la liste des seize membres du « Bureau du Comité d’Abidjan du F.L.N.G. », M. Barry Yaya figure effectivement en cinquième position, avec le titre de secrétaire général. Sur la base de renseignements « sûrs » transmis de Guinée - par un correspondant trop optimiste du F.L.N.G. ou un agent provocateur, on ne l’a jamais su - le malheureux avait accepté de partir pour le Fouta-Djalon, croyant pouvoir organiser un maquis avec l’appui de la chefferie traditionnelle.
Mais déjà, le chef de l’État ivoirien abandonne la Guinée comme cible. Il veut consacrer temps et moyens à un problème autrement important - le Biafra - dont la solution heureuse ouvrirait des perspectives réellement belles en Afrique. Peut-être se rend-il compte également de l’impossibilité de faire ployer le leader guinéen ?
Il cesse, en avril 1968, de subventionner le « regroupement des Guinéens en France » qui avait pris la suite du F.L.N.G., trop discrédité au sein des jeunes intellectuels guinéens. La Guinée est totalement ignorée de la presse ivoirienne, même quand le régime guinéen prendra fait et cause pour le gouvernement fédéral contre le Biafra. La presse ivoirienne s’abstiendra également de toute référence à M. Sékou Touré, au lendemain de la chute de M. Modibo Keita, en novembre 1968. Et pourtant l’occasion était belle. Elle gardera le silence encore quand le leader guinéen fera état, une fois de plus, de « manifestations contre-révolutionnaires » en janvier 1969, suivies d’un nouveau complot en mars...
Le 13 avril 1969, Radio-Conakry condamne « la querelle que de Gaulle et ses nègres font au peuple guinéen et à sa révolution ». Deux semaines plus tard, le général de Gaulle se retire à Colombey-les-Deux-Églises. Est-ce le début d’une amélioration des relations franco-guinéennes ? En effet, depuis peu, M. Sékou Touré « se résigne à attendre un éventuel changement de titulaire du pouvoir en France » pour se rapprocher de Paris.