été arrêté huit mois auparavant, à l’escale d’Accra, est victime de la même mésaventure le 26 juin 1967. Par suite du mauvais temps, l’avion de ligne néerlandais qui le transporte est obligé d’atterrir à Abidjan. M. Achkar Marof, délégué guinéen à l’O.N.U., se trouve sur le même appareil.
L’affaire est particulièrement grave. En effet, les diplomates guinéens reviennent de la session extraordinaire de l’Assemblée générale de l’O.N.U. qui avait débattu des suites de la Guerre des Six jours. Ils y avaient participé sur convocation du secrétariat général des Nations unies, et voyageaient avec des titres de transport délivrés par lui. L’O.N.U. se trouve donc politiquement responsable de la détention des délégués guinéens.
M. Auguste Denise, qui assure l’intérim du président de la République ivoirien et a, au plus haut point, le souci de la responsabilité, hésite. Le président Houphouët-Boigny, contacté en Europe, lui, se dit « vivement satisfait de cette arrestation historique ». Faut-il ou non les accuser d’un crime quelconque, comme M. Kamano et l’équipage du chalutier ? On préférera s’en abstenir.
Le vendredi 30 juin, à l’issue du conseil des ministres, un long communiqué annonce officiellement l’événement et le présente comme des représailles à l’arrestation de M. Kamano et à l’arraisonnement du “Kerisper”. En conséquence, le gouvernement ivoirien regrette « vivement de se trouver dans l’obligation d’appliquer au président guinéen sa propre conception des rapports internationaux et de retenir en Côte d’Ivoire le groupe de Guinéens jusqu’à la libération des ressortissants ivoiriens, du bateau de pêche et de son équipage ».
Les autorités guinéennes rejettent cette thèse dans la mesure où il s’agit, selon elles, d’une part de deux affaires de subversion caractérisée contre la Guinée, et de l’autre, d’un kidnapping de diplomates guinéens. La Côte d’Ivoire se trouve donc en position d’accusée dans les deux cas.
Contrairement aux dirigeants ghanéens qui avaient cédé aux pressions de l’O.U.A., et libéré au bout de quelques jours les Guinéens arrêtés à leur passage à Accra, le président Houphouët-Boigny, avec sa ténacité coutumière, refuse de suivre la même voie.
Entre-temps, M. Thant offre ses bons offices - acceptés par Abidjan - et promet au président Sékou Touré de mettre « tout en oeuvre pour obtenir la prompte mise en liberté de la délégation guinéenne ». La radiodiffusion guinéenne tonne. La tension entre les deux pays monte de nouveau rapidement. De Genève