l’appel lancé par ses meurtriers à M. Meatchi - réfugié alors à Accra chez le Dr N’Krumah - de regagner Lomé de toute urgence. Ensuite, la mise en état d’arrestation, 48 heures plus tard, de trois ministres ivoiriens et du retrait de l’immunité parlementaire de sept députés, accusés de « menées subversives d’inspiration communiste ». Pour le président Houphouët-Boigny, le lien entre les deux événements paraît irréfutable, car dans son esprit, communisme va de pair avec Moscou. Or Conakry, Bamako et Accra flirtent de toute évidence avec l’U.R.S.S. Donc, les présidents Sékou Touré, Modibo Keita et Kwame N’Krumah ont comploté directement ou indirectement contre lui.
Face à cette alliance de ses ennemis intérieurs et extérieurs, la loyauté de ses trois partenaires du Conseil de l’Entente lui apparaît précieuse. Il convient donc de sortir cet organisme de l’état d’hibernation dans lequel il se trouve depuis dix-huit mois, puis l’utiliser comme instrument pour essayer de mobiliser l’U.A.M.
Le 17 février 1963, le Conseil de l’Entente se réunit par conséquent à nouveau à Abidjan. L’atmosphère a changé. L’organisme paraît revigoré. Le président Houphouët-Boigny remet les insignes de la Grand-Croix de l’Ordre National de la République de Côte d’Ivoire à ses trois collègues. Dans ses discours élogieux, il les considère à nouveau comme des partenaires à part entière. Le communiqué final, publié à l’issue de cette session du Conseil de l’Entente, condamne l’assassinat politique.
Le recours à l’assassinat heurte profondément le leader ivoirien. C’est le premier coup d’État - de plus, sanglant - dans un pays africain ayant accédé nouvellement à l’indépendance. Il y voit, à juste titre, un mauvais présage pour la stabilité des jeunes États. Il essaiera de faire adopter des mesures de mise en quarantaine du nouveau régime togolais. A la conférence constitutive de l’O.U.A. à Addis-Abéba, il interdira même à tous les membres de la délégation ivoirienne d’adresser la parole à M. Apédo Amah, ministre des Affaires étrangères du Togo, venu à la conférence pour essayer d’y faire admettre son pays comme membre.
Par ailleurs, sur le plan politique, l’élimination de M. Olympio représente, sans conteste, un succès pour le Dr N’Krumah. Le leader togolais l’avait accusé publiquement, et à plusieurs reprises, de vouloir l’assassiner. Le Ghana sera, à notre connaissance, le premier État africain à reconnaître le nouveau gouvernement togolais, en dépit de l’émotion considérable dont font preuve les chefs d’État guinéen, libérien et nigérian, sans compter les francophones