français, semblent avoir commencé à ressentir l’attraction du géant nigérien ».
Le caractère « anglo-saxon » de la Nigeria constitue la troisième donnée, plus subjective, de l’analyse du président Houphouët-Boigny. Son antipathie foncière - de type gaullien - le pousse en privé à ne pas employer l’expression « Afrique anglophone » mais à utiliser plutôt celle d’« Africains anglo-saxons ».
Enfin, et peut-être surtout, la survie même d’une Nigeria fédérale prouve à quel point il avait eu tort de démanteler les fédérations de l’A.-O.F. et de l’A.-E.F. Si elle maintient son unité, il ne pourra jamais réduire au silence ses détracteurs, ses adversaires, qui l’accusent d’être le « balkanisateur de l’Afrique ». Cette accusation le heurte dans la mesure où elle est reprise par une partie de l’opinion publique non africaine. Ainsi, moins de deux mois après le référendum du 28 septembre 1958, M. André Blanchet - trop fin observateur des affaires africaines pour ne pas choisir les termes qui font mouche - faisait un rapprochement saisissant en publiant un grand article sur la Nigeria, avec comme titre :
« Sauvée de la balkanisation, la Nigeria deviendra le 1er octobre 1960 le plus grand État indépendant du continent africain. »
Pour ces raisons, M. Houphouët-Boigny doute et redoute la naissance d’une Nigeria indépendante. Sa philosophie propre de l’Afrique et ses intérêts de leader africain le poussent aux côtés des minorités ethniques de la Nigeria qui souhaitent la division de la fédération en États distincts. Et de fait, la tension raciale et les émeutes d’origine tribale si nombreuses, un peu partout en territoire fédéral, apportent de l’eau au moulin du fondateur du R.D.A.
Mais d’un autre côté, les options politiques des dirigeants de la Nigeria sont proches de celles de M. Houphouët-Boigny sur la plupart des problèmes africains. Lagos fait preuve de modération, même vis-à-vis de la France. Certes, de violentes manifestations de protestation sont organisées à Lagos contre les projets français d’expériences atomiques au Sahara ; l’Assemblée de la Nigeria du Nord exprime officiellement son inquiétude à ce sujet. Il n’en reste pas moins qu’à Freetown, en Sierra Leone, le Dr Azikiwe, alors Premier ministre de la Nigeria Orientale, considère, publiquement, que « la question saharienne est un problème intérieur à la France ».
A l’orée de l’indépendance, la convergence des vues politiques prime toute autre considération. A cette époque, les objectifs immédiats de la <br