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Il vaudrait donc mieux, semble-t-il, que « l’accès aux mers chaudes » perde le rang éminent qu’il occupe dans la mythologie politique occidentale.
Car l’enjeu est autrement grave. S’il ne s’agissait que de l’éventuelle installation de bases soviétiques en Égypte ou en Syrie, l’Occident pourrait faire confiance aux nationalistes arabes : les bourgeoisies locales ne peuvent, en effet, se le permettre, sous peine de trahir leurs propres intérêts. Il est inconcevable qu’un Abdel Nasser ou un Kassem accepte, de gaîté de coeur, la transmutation de « son » Égypte ou de « son » Irak en Démocratie populaire.
Le but de Moscou est de loin plus ambitieux ; il s’agit de harceler l’Occident, d’affaiblir ses positions économiques, militaires, politiques et morales, dans une vaste région qui englobe plus du tiers de l’humanité. Les Soviétiques, eux, peuvent se réclamer d’une conception politique planétaire. Pour les dirigeants de I’URSS, tout est subordonné à la lutte entre les deux idéologies. Ils en sont déjà au stade de la « compétition pacifique », tandis que Washington s’agrippe toujours au concept de « compétition militaire ». Plus cette situation se prolongera - I’URSS offrant son aide et les USA demandant des bases - et plus grande sera l’avance acquise par Moscou.
On comprend que, dans une telle conjoncture, le Krem-
lin n’ait pas sous-estimé le rôle décisif que pouvaient - et doivent - jouer les peuples sous-développés. Deux preuves de l’intérêt qu’il porte à l’Orient : les orientalistes soviétiques tiennent, du 4 au 11 juin 1957, à Tachkent, leur premier congrès ; puis, dans le communiqué publié à l’issue de la réunion des « partis communistes des pays socialistes », 20% de la partie relative à la politique internationale sont consacrés aux pays de Bandoeng ; ces derniers sont cités à 21 passages différents du texte.
Si les Soviétiques se sont abstenus de commettre des erreurs, coutumières du côté occidental, ils n’ont pas accompli, non plus, de miracles. Les conditions objectives en Orient leur sont tout simplement favorables.
Tout d’abord, l’URSS n’a pas de passé colonialiste dans le monde arabe. Dès mars 1956, Abd el Nasser mettait en relief ce phénomène lorsqu’il déclarait à un groupe de journalistes
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