politique coloniale - « fille de la politique industrielle », disait Jules Ferry - n’a de sens que si le territoire colonisé devient un réservoir de matières premières et un déversoir pour le trop-plein des produits manufacturés et des fonctionnaires de la métropole. Nous avons relevé aussi que la destruction de la société traditionnelle du pays dominé, rendait inéluctable la naissance d’une classe de marchands chargés de la vente, au détail, des produits manufacturés ou alimentaires
Dans une première phase, cette bourgeoisie naissante, satisfaite de son sort, bénit l’étranger qui lui apporte une prospérité inconnue jusque-là. Mais bientôt, par le jeu
des lois de l’économie, la jeune bourgeoisie autochtone tend à s’enrichir. L’accumulation du capital devient telle, à un moment donné, que son champ d’investissement se trouve fortement réduit. les capitaux indigènes entrent alors directement en concurrence avec ceux d’origine métropolitaine.
Mais au moment précis où la bourgeoisie indigène prend conscience de sa force, elle en mesure l’extrême relativité : son expansion est entravée par les citoyens de la puissance dominante - ou des « protégés » de cette puissance - qui disposent de capitaux plus importants et d’une technique supérieure. La lutte sur le plan purement économique s’avère donc réellement trop inégale. Ne pouvant concurrencer le capital étranger, il faut sinon l’éliminer, du moins en réduire l’influence. L’unique moyen est de transposer le problème du plan économique au plan politique. Les possesseurs autochtones de capitaux deviennent alors nationalistes : ils revendiquent l’indépendance au nom d’une « nation » qui se confond dans leur esprit avec le concept de marché « national ».
Cette évolution explique pourquoi les commerçants d’Alep, de Damas ou de Beyrouth ont apporté leur soutien - surtout financier - aux sociétés secrètes patriotiques, créées par les intellectuels arabes de cette région, au début du XXe siècle.<br class=’autobr’
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