Des interviews exclusives de Dja-Apharou ISSA IBRAHIM, ami et confident de Jacques Baulin, responsable par donation de l’intégralité des documents constituant le fond, et président de l’association sont actuellement publiées dans la rubrique présentation.
Les trois ouvrages de J. Baulin : Conseiller du président Diori, La politique africaine d’Houphouët-Boigny et La politique intérieure d’Houphouët-Boigny
seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
2009.
TRENTE ET UNIEME ANNEE - N°9157
MARDI 25 JUIN 1974
les difficultés de votre commerce extérieur
une question de vie ou de mort
envers ceux qui complotent contre l’ Etat
Le président de la République et Mme Giscard d’ Estaing accueillent le chah d’ Iran et la chabanou à leur arrivée à Paris ce lundi 24 juin à 15h. 30. Les deux chefs d’ Etat devaient prononcer de courtes allocutions dans le salon d’ honneur d’ Orly.
Le chah et l’ impératrice - qui sont accompagnés d’ une suite de treize personnes, dont le ministre des affaires étrangères, M. Abbas Ali Khalabari, et le secrétaire d’ Etat chargé de l’ énergie atomique, M. Akbar Etemad - logeront au Grand Trianon. Fait sans précédent dans de telles circonstances, public sera admis lundi soir dans le parc du palais de Versailles pour le feu d’ artifice qui couronnera la première journée de la visite officielle des souverains iraniens.
A la veille de son départ pour la France, le chah a accordé au Monde une interview dans laquelle il expose les résultats qu’ il attend de sa venue et les objectifs de sa politique tant extérieure qu’ intérieure. La deuxième chaîne de la télévision française devait d’ autre part diffuser ce lundi soir une émission d’ "Actuel II" tournée le 17 juin au palais de Saadabad, au cours de laquelle le souverain répond aux questions de quatre journalistes.
De notre envoyé spécial ANDRE FONTAINE
Téhéran. - Sévèrement gardé par des gaillards moustachus dont l’ uniforme de gros drap kaki est aussi incongru en cette saison que l’ écharpe de laine bleue qui leur ceint le cou, le palais de Saadabad oppose, véritable jardin d’ Allah, la fraîcheur de ses allées bordées de platanes fongiforme, et de ses pelouses constamment arrosées, à la chaleur qui, 200 ou 300 mètres en contrebas, écrase, sans en ralentir l’ activité, la prospère Téhéran, C’ est là que nous a reçu sans façon, à la veille d’ une visite officielle en France dont il attend beaucoup, le chah, ou, pour mieux dire, le chahinchah d’ Iran, dans un bureau qui, aux précieux tapis et aux bibelots d’ or massif près, pourrait être celui d’ un chef d’ Etat européen.
Le regard est de braise derrière les lunettes et le visage sévère ne laisse pas au sourire une place abusive. Mais l’ homme est trop au fait des questions que tout un chacun se pose au sujet de son régime pour laisser voir l’ agacement qu’ il peut éprouver à se les entendre adresser. Il y répond avec un calme plus acquis sans doute que naturel et avec une certitude que rien, apparemment, n’ entame, comme si en lui coexistaient décidément sans peine le Realpolitiker occidentalisé au fait des problèmes financiers, économiques et militaires les plus ardus, et le souverain de droit divin, plus méfiant que jamais envers l’ esprit du siècle.
"Vous êtes le premier chef d’ Etat à venir en visite officielle en France depuis l’ élection de M. Giscard d’ Estaing. Quelle signification particulière faut-il attacher à cette venue, quels résultats concrets en attendez-vous ?"
- Je réponds à une invitation qui m’ avait déjà été adressé par feu le président Pompidou, mais, de part, et d’ autre, nous avons exprimé le désir que la date de la visite soit maintenue. Cela montre l’ importance que l’ on attache aux relations franco-iraniennes. Evidemment, nous pouvons devenir un peu romantiques en parlant de la France et de l’ Orient, d’ histoires comme ça... Mais soyons plus concrets en disant que le sort de l’ Europe ne peut pas être détaché du sort de l’ Iran.
(Lire la suite page 2.1"" col.)
C’ est la revanche après les humiliations. L’ Iran est maintenant l’ un des champions de la course au développement. Son armée est la plus forte de la région. Il a pris la relève, comme gardien du golfe Persique, de l’ arrogante Angleterre.
Moscou a acclamé un souverain dont Khrouchtchev avait cru pouvoir annoncer, dans une interview, la chute prochaine. La Chine ne ménage pas son soutien à un régime qui, bien que de droit divin, présente pour elle l’ avantage de constituer le meilleur rempart aux ambitions soviétiques en Asie occidentale. Les Etats-Unis eux-mêmes ne parviennent pas à convaincre le chah de suivre l’ exemple du roi Fayçal d’ Arabie et d’ abaisser le prix du pétrole.
Mohammed Reza Pahlevi, désormais, parle haut, dénonce la responsabilité des grandes compagnies pétrolières et du fisc des pays occidentaux dans la hausse des prix de l’ énergie, morigène la société européenne, à son goût trop "permissive", dispense la manne de son assistance, de l’ Inde au Sénégal, à dix pays du tiers-monde, encourage en sous-main le soulèvement kurde et traite par le mépris ceux qui se permettent de critiquer, taches d’ ombre trop visibles sur la gloire de l’ empire, les excès d’ une police politique omniprésente, acharnée à voir des traîtres là où il y a surtout les contestataires.
Malgré les énormes inégalités sociales qui le caractérisent, l’ Iran est, comme le disait M. Pierre Moussa des Etats-Unis, "un fragment du tiers-monde qui a réussi". La place qu’ il tient aujourd’hui, celle qu’ il tiendra demain dans les approvisionnements de la France en pétrole et en gaz, les perspectives qu’ il ouvre à nos exportateurs pour le développement de son industrie, notamment nucléaire l’ intérêt qu’ il porte à Concorde, la construction éventuelle d’ un métro à Téhéran, d’ autres projets encore, créent entre les deux économies une complémentarité manifeste.
A cette complémentaire s’ en ajoute une autre, d’ ordre diplomatique. Sa culture française, l’ admiration qu’ il vouait au général de Gaulle, l’ estime que celui-ci lui portait, ont contribué à instaurer entre les deux gouvernements, malgré la brouille éphémère née du rendez-vous manqué avec le président Pompidou à Persépolis, une similitude de comportement. L’ attachement à l’ indépendance nationale, malgré l’ alliance américaine, le refus du partage du monde, la coopération avec l’ Est, Chine comprise, aussi bien qu’ avec l’ Ouest, l’ amitié avec le tiers-monde, caractérisent l’ Iran comme la France, puissances de taille trop comparable pour que leurs réflexes ne soient pas un peu les mêmes face aux candidats à l’ hégémonie.
Pour que l’ harmonie cependant soit complète, pour que le peuple français accueille sans réticence ce souverain à la fois moderne et traditionnel, mari d’ une reine dont personne n’ oublie l’ éducation française, il faudrait que le chah, qui a su dégager pour l’ Iran les chemins de la puissance, paraisse tout aussi déterminé à lui ouvrir aussi ceux de la liberté politique. Il est clair, malheureusement, que, comme trop d’ autres chefs d’ Etat de ce temps, il se soucie plus du premier objectif que du second.
auraient fait
deux cents morts
au Kiangsi
Les indications données par les journaux muraux sur les "incidents sanglants" du Kiangsi sont confuses. Les heurts signalés les 10 et 18 juin sont localisés dans la ville de Jui Chin, aux confins de la province voisine du Foukien. Celui du 19 juin, au cours duquel on s’ est servi de "projectiles", de "gourdins" et de "barres de fer", a eu lieu dans la capitale provinciale, Nanchang. Il est impossible cependant de savoir avec certitude si les deux cents morts dont les textes font état ont été victimes de ces incidents précis ou de heurts plus anciens.
Les affiches sont signées par des travailleurs originaires de la province du Kiangsi, qui rapportent que des familles ont été décimées, et citent le cas d’ une femme de soixante et onze ans qui a été tuée. Plusieurs personnes, ajoutent-ils, ont été arrêtées. L’ incident du 19 juin, rapportent les signataires, a été fomenté par des "éléments droitistes" qui, armés de bâtons, se sont emparés de plusieurs camions pour s’ en servir comme véhicules de propagande.
Dès samedi, quelques affiches avaient déjà signalé l’ existence de tensions dans le Kiangsi, accusant certains dirigeants de "saboter" la production.
(Lire la suite page 7, 3° col.)
écartent tous deux l’ éventualité
d’ une dissolution de l’ Assemblée
M. Valéry Giscard d’ Estaing s’ exprimant dans les colonnes de Paris-Match et M. Jean Lecanuet, garde des sceaux, prenant la parole devant les dirigeants du Centre démocrate, qu’ il préside, ont tous les deux écarté l’ éventualité d’ une dissolution de l’ Assemblée nationale élue en mars 1973.
A lendemain des élections législatives de mars 1973, M. Alexandre Sanguinetti, secrétaire général de l’ U.D.R., avait fort bien compris et clairement expliqué à ses amis gaullistes que leur adversaire le plus dangereux était un parti socialiste en pleine expansion et qu’ il leur fallait donc, avant tout, se garder à gauche.
Quinze mois plus tard ce souci demeure vif dans les rangs de la formation gaulliste comme on vient de le constater à la faveur de la réunion de ses secrétaires fédéraux. Nombreux ont été, à cette occasion, les orateurs qui ont jugé indispensable, pour conjurer les risques d’ éclatement de la famille, de relancer des thèmes tels que ceux de la participation ou de la réforme de l’ entreprise. M. Sanguinetti leur a fait écho en invitant ses compagnons, qui sont aujourd’hui, a-t-il dit, "dans la traversée de la savane", à militer avec une ferveur particulière "dans les associations, dans les entreprises dans les syndicats".
Le même désir de "gauchissement" est apparu dans les instances dirigeantes du Centre démocrate où il s’ est beaucoup agi de la cogestion, de la planification démocratique et aussi du contrôle de l’ utilisation de l’ argent public, exigence déjà ancienne de M. Servan-Schreiber. Si M. Lecanuet manifeste la prétention de faire de son parti "le centre gauche de la majorité nouvelle" et l’ invite à être l’ "aiguillon démocrate social et européen" de cette majorité, ce n’ est pas seulement pour plaire à ses anciens compagnons de route du M.R.P. c’ est également pour faire comprendre à tout un chancun qu’ il serait mal venu de vouloir "occuper le terrain où nous nous plaçons". L’ avertissement s’ adresse plus particulièrement à M. Michel Jobert, qui entendait précisément se situer au "centre gauche" et dont l’ entreprise encore balbutiante semble bénéficier, d’ après les propos tenus samedi à Paris, du préjugé favorable de la "base" U.D.R. Elle pourrait ne pas déplaire non plus à M. Jean Charbonnel, ancien ministre du développement industriel et scientifique, lequel reprend un thème que MM. Mitterrand, Chaban-Delmas et Royer avaient tous trois développé pendant la campagne présidentielle lorsqu’il dénonce la toute-puissance du ministère des finances, "citadelle qui sera prise un jour".
Le terrain de prédilection de l’ ancien ministre des affaires étrangères demeure toutefois celui de la diplomatie. Son opposition à toute évolution de la politique française - "Le désir de plaire ne doit pas commander la politique d’ une nation" - procède d’ une intransigeance très voisine de celle de M. Michel Debré, qui réclame sans relâche "une diplomatie aux mains libres" et souligne avec insistance que "l’ indépendance ne se quémande pas".
Gauchissement d’ une part, raidissement d’ autre part sur le thème de l’ indépendance nationale, voilà qui suffit à confirmer la précarité et l’ absence de réelle homogénéité d’ une nouvelle majorité qui avait pourtant accordé, le 6 juin, la totalité de ses voix au gouvernement de M. Chirac.
Lorsque M. Valéry Giscard d’ Estaing se plaît à souligner, dans une déclaration faite à Paris-Match, que "nous nous trouvons dans un des rares cas où la majorité présidentielle et la majorité parlementaire coïncident, il a les apparences pour lui, mais M. Lecanuet rend peut-être mieux compte de la réalité profonde lorsqu’il constate : "Le nouvel équilibre apparaît très visiblement dans la composition du gouvernement, mais n’ apparaît pas à l’ Assemble nationale."
Le président de la République et son garde des sceaux sont d’ accord pour écarter l’ éventualité d’ une dissolution et pour juger qu’ il y a mieux à faire que d’ immobiliser le pays dans une "nouvelle bataille électorale", mais il semble bien qu’ ils ne raisonnent l’ un et l’ autre que sur le court terme. C’ est à la fois le bon sens et la prudence.
(Lire nos informations page 10.)
Par FRANCOIS DALLE
L’ entreprise contemporaine est doublement contesté. Considérée de l’ extérieur, elle apparaît à la fois comme le symbole et le moteur d’ une société industrielle dont la finalité de croissance est aujourd’hui, à maints égards, mise en question. Considérée de l’ intérieur, elle continue d’ imposer aux producteurs qu’ elle rassemble les contraintes d’ une vie sociale organisée, alors qu’ elle ne manque pas de flatter leurs instincts libertaires lorsqu’elles s’ adresse à eux en tant que consommateurs. De cette double contestation naît, partout en Europe d’ ailleurs, une revendication généralisée en faveur d’ un rééquilibrage du pouvoir dans l’ entreprise, pouvoir que la législation des sociétés industrielles et commerciales attribue généralement au seul capital, que ce dernier soit fourni par des investisseurs privés ou, dans le cas des entreprises nationalisées, par la collectivité.
Cette revendication doit être satisfaite. Il en est d’ ailleurs tenu compte, déjà, dans la pratique. L’ évolution a commencé avec la fin de l’ "establishment" industriel, lorsque l’ entreprise est entrée dans les turbulences de l’ économie concurrentielle. Jusqu’alors prédominant, le capital privé a dû partager le pouvoir avec des techniciens du changement et de la gestion.
(Lire la suite page 39. 1"" col.)
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AU JOUR LE JOUR
L’ Archipei du Goulag éprouve quelque difficulté à être vendu dans la librairie située à l’ intérieur du bâtiment placé sous la juridiction des Nations unies.
Sans faire rebondir la querelle Soljenitsyne, certains peuvent s’ en étonner ou même s’ en indigner. Ils auraient tort. Dans l’ actuel système international, seuls les représentants du pouvoir politique dûment accrédités ont le droit de s’ injurier d’ Etat à Etat et de régime à régime.
les autres doivent, dans le cadre des Nations unies, s’ abstenir de faire à aucune de ces nations la moindre peine, même légère.
Ce qui, évidemment, exclut la littérature mais non cette rhétorique insipide et inodore que les rédacteurs de rapports destinés aux organisations internationales connaissent bien.
Au fond, Soljenitsyne aurait dû s’ adresser à quelques collaborateurs de M. Walaheim pour faire traduire son oeuvre en langue onusienne.
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