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U-003-332-002 - NOTES - classeur U - Fonds d'archives Baulin

U-003-332-002

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Page 2 - LE MONDE - 19-20 juin 1977...

DIPLOMATIE
LE TRENTIEME "SOMMET" FRANCO-ALLEMAND


Bonn a fait une concession à Washington en mettant fin "jusqu’à nouvel ordre" aux exportations d’ installations nucléaires


Célébrant en présence de M. Giscard d’ Estaing le cinq centième anniversaire de l’ université de Mayence, le président de l’ Allemagne fédérale, M. Scheel, a, à l’ issue du "sommet" franco-allemand, déclaré que " les Français et les Allemands devaient apprendre à se connaître et à s’ estimer encore mieux que par le passé". Après avoir affirmer qu’ "il convenait de mettre fin aux clichés, aux fausses informations et aux malentendus sur l’ Allemagne", il a ajouté : "Il y a dans la presse française des images déformées sur la R.F.A., l’ Etat le plus démocratique de notre histoire (...). Celui qui calomnie la R.F.A. en prétendant qu’ elle est un pays où règne la répression policière ne la connaît pas, ne veut pas la connaître ou animé de mauvais intentions." Dans sa conclusion, M. Scheel a dit que la Résistance française ne devait pas être considérée comme un mouvement anti-allemand mais comme un des premiers fondements d’ une entente avec une Allemagne libérée du joug hitlérien.


Parlant ensuite en allemand, M. Gisacrd d’ Estaing a déclaré que sans une confédération de l’ Europe et "son indispensable pilier franco-allemand", les deux pays risqueraient de n’ être plus "porteurs de civilisation".


De notre correspondant


Bonn. - A l’ issue du trentième "sommet" franco-allemand, le gouvernement de Bonn a publié, le vendredi 17 juin, une déclaration dans laquelle il annonce sa décision de ne plus délivrer "jusqu’à nouvel ordre d’ autorisations pour l’ exportation d’ installation et de technologies de retraitement (des combustibles nucléaires irradiés). Cette mesure n’ attecte ni les traités existants ni application". On comprend mieux ainsi ce que M. Valéry Giscard d’ Estaing avait voulu dire la veille au soir dans le toast prononcé au dîner : "Nous avons des positions semblables et nous serons amenés à les exprimer de manière identique", avait déclaré le chef de l’ Etat (le Monde du 18 juin).


En effet, la position adoptée par Bonn correspond à celle annoncée par le gouvernement français en décembre (le Monde du 18 décembre 1976). La décision ouest-allemande n’ est pas à proprement parler un résultat des consultations franco-allemandes : le chancelier Schmidt a bien précisé qu’ il s’ agissait d’ une "décision unilatérale" du gouvernement fédéral. Le conseil des ministres a tenu, jeudi, une réunion extraordinaire au cours de laquelle la déclaration a été adoptée après consultation du conseil nucléaire. Il est clair cependant que l’ embargo mis sur les exportations d’ installations et de technologie "sensibles" (la déclaration ouest-allemande parles des usines de retraitement, mais pas des usines d’ enrichissement de l’ uranium) est la conséquence non seulement des pressions américaines exercées pendant plusieurs mois sur la R.F.A., et encore récemment à la réunion de Londres, mais aussi de la décision française de février. Les français ont fait comprendre à leur partenaire que la coopération bilatérale pour l’ utilisation pacifique de l’ énergie nucléaire serait difficile si les deux pays n’ avaient pas la même politique d’ exportations. L’ embargo décidé par la France ne pouvait qu’ affaiblir la résistance des Allemands de l’ Ouest aux pressions américaines. " On en avait déjà parlé au "sommet" franco-ouest-allemand de Paris, en février dernier, mais le moment n’ était pas encore venu de prendre une décision", nous a déclaré le porte-parole du gouvernement fédéral.


Des "resultats
substantiels"


En contrepartie de l’ importante concession qu’ ils viennent de consentir aux Américaines les Allemands de l’ Ouest partent du principe que les arrangements conclus dans le passé sur la fourniture de combustible nucléaire et autres matériels nécessaires à l’ utilisation pacifique seront respectés, nonobstant la suite des entretiens engagés au "sommet" de Londres, indique la déclaration. On se souvient qu’ il y a quelques mois les Américains et les Canadiens ont interrompu leurs livraisons d’ uranium à l’ Europe (les livraisons américaines ont repris depuis).


En insistant à la fois sur le caractère unilatéral de leur décision et la coïncidence parfaite des positions françaises et allemandes, le gouvernement fédéral espère que l’ opinion publique de la R.F.A. acceptera plus facilement une décision qui représente un changement radical de politique. Jusqu’à maintenant, la R.F.A. avait refusé de prendre un tel engagement, elle avait même constamment présenté l’ accord avec le Brésil comme un modèle du genre pouvant servir d’ exemple à d’ éventuels contrats avec d’ autres pays. Il y a quelques jours encore, en réponse à une question de l’ opposition chrétienne-démocrate sur la politique nucléaire, le gouvernement avait réaffirmé cette position.


Le contrat avec le Brésil qui porte sur la livraison de huit centrales nucléaires, d’ une usine d’ enrichissement de l’ uranium et d’ une installation de retraitement du combustible irradié - pour un montant global de 12 milliards de marks (24 milliards de francs) - n’ est pas touché par l’ embargo, de même que la France reste apparemment décidée à honorer son accord avec le Pakistan.


Selon le président de la République, le trentième "sommet" franco-allemand a produit "mieux que des résultats sensationnels, des résultats substantiels". En dehors du nucléaire, les deux gouvernements sont tombés d’ accord pour mettre à l’ étude la construction en commun d’ un nouvel avion moyen-courrier pour lequel les Français prévoient un marché très prometteur dans les années 80.


MM. Schmidt et Giscard d’ Estaing, d’ une part, Barre, Apel (ministre allemand des finances) et Friderichs (ministre de l’ économie) d’ autre part, ont examiné la conjoncture économique. Le chancelier a déclaré que, en gros, les deux gouvernements sont satisfaits de la reprise économique dans les deux pays. Selon lui, la croissance devrait s’ accélérer en R.F.A. au cours du second trimestre. L’ augmentation du produit national brut pourrait ainsi atteindre 4,5% pour l’ ensemble de l’ année "et peut-être plus", a-t-il dit, M. Giscard d’ Estaing a annoncé que les deux gouvernements procéderaient, dans le courant de l’ été, à un échange d’ informations sur l’ application et l’ efficacité des mesures prises pour améliorer l’ emploi. Le groupe des hauts fonctionnaires, qui s’ est réuni à Paris le 8 juin, se retrouvera au mois d’ octobre non seulement pour examiner la situation économique, mais aussi pour tenter de coordonner la politique des deux gouvernements.


Evoquant la visite de M. Brejnev à Paris, le président de la République a rappelé "l’ attachement de la France et de la République fédérale à la poursuite de la détente". Il a souligné l’ intérêt porté par son gouvernement à l’ évolution de l’ Afrique, et a appelé ses partenaires à accorder un soutien supplémentaire au développement de ce continent. Les deux pays veulent s’ engager plus activement en faveur d’ un règlement pacifique au Proche-Orient, qui sera à l’ ordre du jour du prochain conseil des ministres des affaires étrangères des Neuf.


En conclusion, M. Schmidt a indiqué que les conversations avaient été "franches, amicales et intimes" et M. Giscard d’ Estaing a attiré l’ attention sur un "trait politique important" : le Bundestag et l’ Assemblée française ont approuvé le même jour l’ élection du Parlement européen au suffrage universel direct. Le Bundestag a adopté le projet jeudi après midi à l’ unanimité tandis que dans la soirée il était déclaré adopté par l’ Assemblée nationale française, faute du dépôt d’ une motion de censure.


DANIEL VERNET

LE "MAL ALLEMAND"


(Suite de la première page.)


Le général Binoche, gaulliste d’ opposition : "Chaque jour qui passe nous confirme, d’ une part, le désir de l’ Allemagne d’ annuler progressivement, mais totalement, les conséquences politiques de sa défaite et de repartir vers de nouveaux rêves de grandeur, et, d’ autre part, la volonté quasi-absolue en France de dissimuler le danger évident que nous fait courir cette Allemagne toujours si semblable à travers le temps" (Nouvel Observateur, 1975).


André Frossard : "Europe - voir : Grossdeutschland" (l’ Appel, juin 1977).


Bref, on en viendrait à considérer que l’ Allemagne fédérale n’ est même plus un partenaire incommode, mais est bel et bien devenue l’ ennemi potentiel, le danger numéro un pour la France et pour l’ Europe dans les années futures. Pourquoi cela ? Parce que l’ Allemagne fédérale serait aujourd’hui un Etat impérial et dominateur.


Cette thèse ne correspond pas à la réalité de l’ Allemagne. Que la réalité de l’ Allemagne. Que la R.F.A. soit partisan de l’ OTAN, développe une industrie nucléaire civile, renforce la Bundeswehr, pratique l’ agressivité commerciale et défendre ses intérêts propres dans la négociation, c’ est sont droit le plus strict. Chacun a le droit d’ être "gaulliste" quand il le peut. Où est le danger ?


En fait, s’ il y a un danger allemand, il est plutôt celui de la fragilité qui résulte des contradictions présentes de l’ Allemagne fédérale.


- Car il y a un "mal allemand". Ce pays est sans réserves politiques, idéologiques et spirituelles du fait que l’ Allemagne de l’ Ouest - comme la R.D.A. - droit son existence non pas à elle-même mais aux décisions alliées et aux circonstances de la guerre froide.


Certes, il ne faut pas l’ oublier, à cette époque une nouvelle Allemagne est née : une Allemagne démocratique, fédérale, progressiste en certains domaines (la cogestion industrielle, les libertés publiques au sein de l’ armée) et plus permissive que la société française. Tout cela demeure. Mais cette Allemagne fédérale s’ est forgée dans le manichéisme de la guerre froide, la crise de Berlin, la crainte du déferlement soviétique, le refus du bolchevisme et du communisme. L’ Allemagne s’ est tout de suite considérée comme le bouclier de l’ Europe occidentale. Bien sûr, depuis 1949, le monde a beaucoup changé, mais la R.F.A. est restée prisonnière de ses origines. "L’ anti-communisme spontané de l’ Allemand moyen nous préserve d’ une situation italienne : son ardeur au travail et son sens de l’ économie, d’ une situation britannique. Ces deux éléments sont notre seul capital" (Die Welt).


Un crise d’ identité


Illustrons cette crise d’ identité de l’ Allemagne fédérale par trois exemples significatifs.


Malgré l’ Ostpolitik du chancelier Brandt et la normalisation des rapports avec la R.D.A., la R.F.A. ne peut pas accepter l’ idée de l’ existence irréversible de deux Etats allemands séparés et distincts ; la loi fondamentale, les discours politiques et les conversations montrent bien que l’ idée d’ une entité allemande reste profondément ancrée dans les esprits ; la civilisation, la langue, la culture et l’ histoire sont des liens trop denses pour séparer à jamais les deux populations allemandes. Dans ces conditions, comment l’ Allemagne fédérale ne serait-elle pas partagée entre un sentiment d’ antagonisme vis-à-vis du système politique et économique de la R.D.A. et un sentiment de fraternité à l’ égard des Allemands de l’ Est ? Mais alors une incertitude pèse sur la stabilité.


La second exemple a trait à la politique intérieure de la R.F.A. Alors que l’ on glosait encore sur la force et la stabilité du gouvernement de Bonn par rapport à la fragélité de ses homologues européens, une série d’ événements intervenus depuis les élections législatives d’ octobre 1976 ont révélé la gravité de la crise politique en R.F.A. L’ Etat fédéral semble être devenu incapable de résoudre les principaux problèmes de la société allemande. Il ne sait que faire à l’ égard du chômage, de la crise universitaire, des problèmes financiers et administratifs des grandes villes, de l’ énergie nucléaire. Il y a blocage des projets de réforme ébauchés par le gouvernement (divorce, avortement, réforme foncière, école), déclin de l’ autorité, développement de la corruption, fragilité des coalitions régionales, incertitude sur la coalition gouvernementale.


Plus significatif encore est l’ ébranlement du parti social-démocrate. Le parti socialiste le plus puissant d’ Europe est actuellement secoué par de profonds mouvements internes : d’ une part, l’ affaire Schütze (démission du bourgmestre de Berlin pour cause de corruption), le néoptisme, l’ exclusion du responsable des Jusces, une certaine sclérose de l’ appareil et la perte d’ audience dans les Lander) ; d’ autre part, la contestation dans le mouvement syndial, le renouvellement du groupe parlementaire S.P.D. avec l’ arrivée d’ une génération de responsables politiques moins marqués par la guerre froide et plus ouverts aux réalités européennes. En m^me temps réapparaît le débat idéologique au sein du parti.


Derrière les progrès apparents du conservatisme, du conformisme et de la peur du terrorisme, le sentiment se répand de plus en plus chez les Allemands qu’ il ne sera plus possible de se reposer sur les seuls principes de 1950 - défense contre l’ U.R.S.S., anti-communisme, prospérité et alliance atlantique, - mais qu’ il faudra apprendre à vivre dans la contradiction, l’ insécurité et la relative qui sont actuellement les lois de l’ évolution européenne. L’ ère du "consensus Adenauer" semble bel et bien finie. Chacun le sent. Mais il est très difficile d’ assurer la transition et de devenir un pays européen comme les autres. Et les Allemands sont inquiets et perplexes. Ils hésitent actuellement pour leur politique, leur législation et leur société entre 195 et 1980, c’est-à-dire entre les certitudes rassurantes de la guerre froide et l’ aventure des voies nouvelles.


La crainte de l’ isolement


Le troisième exemple de la fragilité allemande a trait à ses relations avec l’ Europe occidentale. La R.F.A. craint beaucoup le développement de l’ eurocommunisme et des fronts populaires en Europe occidentale, car il signifierait pour elle la victoire de la cinquième colonne soviétique. Les déclarations politiques et la presse ouest-allemande en font foi ; et il est très probable qu’ une victoire de la gauche à Paris créerait de grandes difficultés psychologiques pour le gouvernement de Bonn, quel qu’ il soit.


Mais l’ Allemagne fédérale craint tout autant l’ isolement qui résulterait pour elle-même de l’ évolution européenne. La population allemande et le gouvernement de Bonn sont très inquiets à l’ idée d’ apparaître comme un donjon conservateur isolé au milieu d’ une Europe occidentale évolutive. La R.F.A. ne veut surtout pas développer un "isolationnisme germanique" au sein de l’ Europe : contrairement à ce que pensent certains esprits, elle tient essentiellement à préserver la coopération au sein de la C.E.E. et entre l’ ensemble des Etats européens. L’ Allemagne fédérale n’ a actuellement aucun goût pour être le gendarme de l’ Europe. D’ où l’ incertitude, le désarroi l’ inquiétude vis-à-vis de l’ avenir européen.


Telle est aujourd’hui la situation allemande. Alors que faire ? Il serait pure folie, pour l’ intérêt de la France et de l’ Europe, de pratiquer un quelconque racisme anti-allemand. L’ Allemagne fédérale n’ est pas ce monstre dangereux dont beaucoup parlent aujourd’hui. Elle a ses défauts et ses tares comme tout peuple, comme nous-même. L’ Allemagne fédérale pratique une certaine chasse aux sorcières, l’ Italie connaît le terrorisme politique et la montée d’ un certain néo-fascisme, la Grande-Bretagne a son problème irlandais et la France n’ est pas un modèle de liberté d’ information. Par ailleurs, l’ Allemagne est un allié à l’ égard duquel la France a pris des engagements, un client, un voisin et un partenaire européen essentiel. Mais l’ Allemagne peut encore développer beaucoup d’ autres liens avec la France si les deux peuples le veulent. Or la France est peut-être le pays européen qui peut aider le plus efficacement l’ Allemagne de l’ Ouest à accomplir la transition pour sortir des années 50.


En conclusion, laissons parler le général de Gaulle :


"J’ entends agir pour que la France tisse avec l’ Allemagne un réseau de liens préférentiels qui peu à peu amènent les deux pays à se comprendre et à s’ apprécier comme leurs instincts les y poussent dès lors qu’ ils n’ emploient plus leurs forces vives à se combattre."


JACQUES HUNTZINGER.

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