Des interviews exclusives de Dja-Apharou ISSA IBRAHIM, ami et confident de Jacques Baulin, responsable par donation de l’intégralité des documents constituant le fond, et président de l’association sont actuellement publiées dans la rubrique présentation.
Les trois ouvrages de J. Baulin : Conseiller du président Diori, La politique africaine d’Houphouët-Boigny et La politique intérieure d’Houphouët-Boigny
seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
2009.
UNE CONVERGENCE D’ANALYSE
l’échange de documents entre la France et l’Union soviétique sur les techniques respectives de réacteurs à neutrons rapides n’a pas une importance technique considérable : à bien des égards , il s’agit essentiellement de la concrétisation , a un instant donné , d’une coopération ancienne (elle date de 1967) et constante puis-qu’il y a chaque années des missions de techniciens français en U.R.S.S. et réciproquement .
Ce qui paraît , en revanche , plus significatif , est le choix de la date choisie pour procéder à cet échange de dossiers . Un peu plus de deux mois après l’annonce de la « croisade » du président Carter contre les risques de la prolifération nucléaire , concrétisée par l’ajournement sine die du retraitement aux Etats - Unis et le retard apporté au lancement du prototype industriel de surrégénérateur , la France et L’Union soviétique proclament haut et fort le parallélisme de leur analyse .
Les deux pays estiment que le monde a non seulement besoin du nucléaire , pour faire face à une demande croissante d’énergie , mais aussi - et surtout - de ce passage à la vitesse supérieure que représente l’adoption des filières à neutrons rapides (surrégénérateurs notamment ) .
Le geste franco-soviétique prend un relief plus particulier encore quand on le rapproche des discussions entamées cette semaine à Paris au sein du groupe d’experts mis sur pied au sommet de Londres à l’instigation des Américains et qui réunit des représentants de sept pays (France , Etats-Unis , Grande-Bretagne , Allemagne fédérale , Japon , Canada et Australie ).
Il semble que , des leur première rencontre , les experts ,’aient pu trouver un terrain d’entente . Suivis par le Canada et l’Australie , les Etats- Unis , selon certaines informations , auraient tenté une nouvelles fois de contester les contrats entre la France et le Pakistan d’une part , l’Allemagne fédérale et le Brésil d’autre part , contrats prévoyant dans les deux cas la livraison d’installations de retraitement .
Le communique publié vendredi 10 juin à l’Elysée au terme de la réunion du conseil de politique nucléaire extérieure rappelle que « l’objet (du groupe d’experts ) est de réaliser une analyse préliminaire des meilleurs moyens techniques de faire face aux besoins énergétiques mondiaux , tout en évitant le danger de diffusion des armes nucléaires » ce qui , au lendemain des premières réunions des experts , n’est pas loin de ressembler à un rappel en règlement , voire un coup de poing sur la table.
L’isolement croissant
des Etats-Unis
Au demeurent , on ne se cache pas , dans les milieux français , que c’est essentiellement pour des raisons politiques que Paris n’a pas décliné l’invitation américaine . Manifestement , on ne pense pas que les travaux de ce comité puissent aboutir à un résultat concret , notamment pour ce qui concerne la recherche de cycles de combustible plus « sûrs » dans l’optique de la prolifération (par exemple le cycle thorium-uranium au lieu du cycle uranium-plutonium) . Aussi , faite-on remarquer à Paris , il y a longtemps qu’une telle alternative a été étudie par le commissariat à l’énergie atomique (C.E.A.) mais ces études ont fini par aboutir dans « le placard aux idées éculées » . Finalement estiment les milieux française , la seule conclusion que pourrait tirer la France de ces travaux , c’est qu’elle a raison de maintenir son analyse et de progresser dans le domaine des surrégénérateurs et du retraitement .
Certains experts vont même plus loin , et prophétisent une issue encore plus spectaculaire : d’ici quelques années - deux à trois va-t-on même jusqu’à dire , --- et une fois relance le programme nucléaire « classique » américain n grâce aux milieux écologiques et à l’accélération des procédures administratives , les Etats - Unis n’auraient plus qu’à constater que « tout bien réfléchit » , il faut retraiter et lancer les surrégénérateurs . Avec un peut de chance , les pressions américaines sur l’Europe et le Japon , auraient eu suffisamment d’effet pour permettre aux Etats-Unis de reprendre la direction des opérations dans des domaine qui tendent aujourd’hui à leur échapper .
Sans aller aussi loin dans l’analyse , force est de constater l’isolement croissant des Américains , seulement soutenues par Australie et le Canada , et la convergence d’analyse entre la France , l’Allemagne fédérale et l’Union soviétique , convergence que devraient vivement souligner les prochaines rencontres de M. Valéry Giscard d’Estaing avec MM. Helmut Schmidt et Leonid Brejnev .
Sur ce dernier point , l’insistance qu’a mise vendredi à Paris l’ambassadeur soviétique à questionner l’administrateur général délégué du C.F.A. M. André Giraud , sur le nouveau procédé français « non-proliférant » d’enrichissement de l’uranium ( le Monde du 8-9 mai ) a surpris plus d’un observateurs , y compris parmi les officiels français . Certaines en ont même tiré la conclusion que , sur ce point , la coopération nucléaire franco-soviétique pourrait bien , à l’occasion de la visite à Paris de M. Brejnev , du 20 au 22 juin prochain , franchir une nouvelle étape .
XAVIER WEEGER
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