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U-003-091-001 - NOTES - classeur U - Fonds d'archives Baulin

U-003-091-001

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    2009.

















9-4-77

Les mesures de M. Carter contre l’ utilisation du plutonium


La France ne compte pas modifier
son programme nucléaire


Le président Carter, dans une déclaration publiée jeudi 7 avril, a annoncé deux décisions importantes concernant la politique nucléaire américaine : les Etats-Unis reportent "sine die" le retraitement des combustibles nucléaires irradiés et ajournent le développement de leur programme de surrégénérateurs afin de limiter l’ utilisation du plutonium, et donc les risques de prolifération nucléaire.


Cette double décision, pour intérieure qu’ elle soit, aura certainement des répercussions internationales. Le président américain n’ a d’ ailleurs pas caché son désir de convaincre ses partenaires sinon de le suivre, du moins d’ adopter des positions voisines.


M. Carter s’ est défendu de vouloir "imposer notre volonté aux pays tels que le Japon, la France, la Grande-Bretagne et l’ Allemagne, qui ont déjà des usines de retraitement en fonctionnement". Mais, a-t-il poursuivi, "nous espérons qu’ ils se joindront à nous" pour promouvoir une prise de conscience à l’ échelle mondiale du danger de la prolifération des armes atomiques.


A Paris, le porte-parole du ministre des affaires étrangères a relevé que ces dernières déclarations montrent que les décisions du président américain "s’ appliquent aux Etats-Unis" et que M. Carter "n’ entendait pas préjuger les moyens par lesquels d’ autres pays satisferont à leurs besoins énergétiques".


"Les milieux français, a-t-il ajouté, remarquent que le président Carter a largement tenu compte des observations présentées tant par la France que par d’ autres pays au cours des récentes consultations menées à l’ initiative des Etats-Unis." La France paraît déterminée, dans ces conditions, à poursuivre son programme nucléaire.


La décision prise par le président Carter, au nom de sa politique de non-prolifération, de mettre pratiquement "hors la loi" le plutonium paraît au premier abord logique : quelques kilogrammes de plutonium suffisent en effet pour fabriquer une bombe atomique.


Toutes les centrales nucléaires produisent du plutonium. Celui-ci, quand on retire le combustible irradié du réacteur, se trouve mélangé à l’ uranium non "brûlé" et aux divers déchets. Le retraitement - qui serait un processus chimique des plus simples, si ne se posaient des problèmes de protection contre les rayonnements - permet d’ éliminer ces déchets et de récupérer le plutonium et l’ uranium. Bloquer le retraitement signifie donc arrêter la production de plutonium.


Cette mesure en entraîne très logiquement une deuxième, l’ arrêt du programme des surrégénérateurs. Ces réacteurs nucléaires, d’ un type nouveau - que trois pays, la France (en coopération avec plusieurs pays, dont l’ Allemagne fédérale), la Grande-Bretagne et l’ Union soviétique, continuent de développer, - ont, en effet, la particularité d’ utiliser le plutonium comme combustible principal, et, grâce à la présence d’ éléments "fertiles" d’ uranium, de parvenir, tout en fournissant de l’ électricité, à produire plus de plutonium qu’ ils n’ en consomment.


Les mesures annoncées jeudi par le président américain satisferont sans nul doute une bonne partie de l’ électorat américain, qu’ il s’ agit aussi, n’ en doutons pas, de préparer à une poursuite du programme nucléaire "classique". Elles n’ en soulèvent pas moins dès à présent, une opposition nette dans certains milieux d’ outre-Atlantique, industriels notamment : l’ industrie nucléaire américaine exprime ouvertement son inquiétude - des placards publicitaires commencent à apparaître dans la presse, - faisant notamment valoir qu’ il est trop tard pour revenir en arrière, qu’ on ne peut "faire rentrer le diable dans sa boîte" ; surtout, elle conteste les études économiques concluant à la non-rentabilité du retraitement, sur laquelle l’ administration Carter appuie aussi sa décision.


XAVIER WEGER.
(Lire la suite page 2.)

UN LUXE
AMERICAIN


La décision du président Carter d’ interrompre le retraitement des combustibles nucléaires irradiés ainsi que le report du programme de surgénérateurs, pour barrer la route à l’ utilisation massive du plutonium, ouvrent-ils une nouvelle ère dans la lutte contre la prolifération des armes atomiques ? On peut en douter.


Il semble, en effet, qu’ il soit déjà trop tard : le plutonium est aujourd’hui produit par centaines de kilogrammes dans tous les réacteurs nucléaires fonctionnant dans le monde. La crise énergétique mondiale est trop grave pour qu’ il soit possible d’ arrêter le développement des programmes électronucléaires. Et le retraitement - dont les procédés chimiques sont publies depuis plus de vingt ans - est accessible à la majorité des pays. L’ Inde l’ a montré en faisant exploser en 1974 un engin nucléaire grâce au plutonium obtenu à l’ aide d’ un réacteur et du combustible fournis par le Canada.


M. Carter assure qu’ il n’ entend pas imposer sa politique à ses alliés. Il espère néanmoins qu’ ils se joindront aux Etats-Unis pour empêcher d’ autres pays d’ acquérir des installations de retraitement. Aux efforts déployés par Washington pour empêcher la vente de telles usines par la France au Pakistan et surtout par l’ Allemagne au Brésil, on a mesuré à quel point cet "espoir" peut être insistant. Sans doute M. Giscard d’ Estaing a-t-il donné satisfaction à Washington en mettant l’ embargo sur de telles exportations à l’ avenir : l’ affaire conclue avec le Pakistan sera la dernière. Sans doute aussi la France ne sera-t-elle pas en mesure d’ exporter des surrégénérateurs avant dix ans. Mais le conflit de doctrine apparu entre les politiques nucléaires de Paris et de Washington laisse entrevoir de nouveaux affrontements commerciaux lourds de menaces pour l’ avenir de l’ industrie française de l’ atome.


M. Carter voit déjà en tout cas se dresser contre lui des alliés de toujours des Etats-Unis. Le gouvernement de Bonn a fait savoir, d’ une part, qu’ il livrerait au Brésil l’ usine de retraitement promise, d’ autre part, qu’ il entendait s’ en tenir, pour l’ essentiel, au traité de non-prolifération qu’ il a signé en 1969. Or ce texte affirme le droit inaliénable des parties d’ accéder à toutes les ressources de l’ énergie nucléaire civile.


Le Japon paraît particulièrement touché : l’ administration américaine bloque en effet la mise en route d’ une usine de retraitement construite avec l’ aide de la France. Comme ses partenaires européens, le Japon est pauvre en énergie et ne peut se payer le luxe d’ un programme nucléaire qui négligerait le plutonium. Les pays qui n’ ont pas, comme les Etats-Unis, de l’ uranium et du charbon en abondance ne peuvent pas ne pas s’ opposer aux projets, à la fois dispendieux sur le plan économique et même dangereux sur le plan de l’ écologie, de M. Carter. Il ne semble pas d’ ailleurs que les Américains soient très heureux à l’ idée de voir leur pays devenir une sorte de poubelle de la planète en accueillant les déchets d’ autres pays.


Le retraitement est sans doute le noeud du problème, encore qu’ il faudra bien un jour s’ intéresser de plus près à l’ enrichissement. Le progrès technique mettra probablement bientôt, en effet, ce dernier procédé à la portée d’ un plus grand nombre : or l’ uranium très enrichi peut, lui aussi, permettre la fabrication d’ une bombe. L’ arrêt total du retraitement n’ étant pas concevable, une ancienne idée de M. Kissinger ne peut que réapparaître tôt ou tard, et M. Carter y a fait allusion jeudi ; celle de la mise en place d’ usines de retraitement fonctionnant sous contrôle international.

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