Des interviews exclusives de Dja-Apharou ISSA IBRAHIM, ami et confident de Jacques Baulin, responsable par donation de l’intégralité des documents constituant le fond, et président de l’association sont actuellement publiées dans la rubrique présentation.
Les trois ouvrages de J. Baulin : Conseiller du président Diori, La politique africaine d’Houphouët-Boigny et La politique intérieure d’Houphouët-Boigny
seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
2009.
Page 12 - LE MONDE - 4 janvier 1977...
Le panorama des gestions à court terme comparées de l’ Allemagne de l’ Ouest de la France de la Grande-Bretagne et de l’ Italie est réalisé par une équipe de conjoncturistes européens avec la collaboration de Cégos-Economie.
Ont été sélectionnés six indicateurs (taux de croissance de la production industrielle, prix à la consommation, taux de chômage, équilibre des échanges commerciaux, goulets de production et investissement, degré de sensibilité au marché international. Les quatre premiers font l’ objet de graphiques de manière à montrer aussi nettement que possible la position relative de chaque pays. Ce qui permet ensuite de les noter (pour les deux derniers indicateurs, on se limitera à ces notes).
Ces appréciations seront obtenues par regroupement des résultats autour des trois objectifs majeurs d’ une bonne gestion à court terme,a croissance la plus forte possible : b croissance de bonne qualité (inflation et taux de chômage limités) : c croissance pouvant être maintenue (rythme d’ investissement suffisant échanges équilibrés degré de sensibilité au marché international limité).
D’ autres montrent que la détérioration semble s’ arrêter. Ainsi les ventes au détail de novembre ont-elles à nouveau progressé de 2%. De même les mises en chantier de logements sont plus satisfaisantes, avec un rythme annuel de 1 800 000. A l’ opposé, il est vrai, les constructeurs automobiles sont moins optimistes. Ils revoient leurs prévisions en baisse, 1976 devant se terminer par une production de 10,2 millions. Cela les amène à fermer des installations et à licencier. Les sidérurgistes, comme partout d’ ailleurs, sont en difficulté. Dans l’ ensemble donc, il y a une incertitude qu’ exprime bien l’ indice des douze indicateurs qui permet habituellement de prévoir l’ activité des mois à venir : après avoir reculé en août et en septembre, cet indice a marqué en octobre une pause et, après correction, il esquisse à nouveau maintenant une légère reprise de 0,2%.
En Allemagne fédérale, la situation semble meilleure depuis peu. Comme on le constate sur le graphique, fait nouveau assez remarquable, le taux de croissance industrielle remonte de 2% à 5%. Cette évolution, comme celle de la Grande-Bretagne, dont le taux prend aussi, légèrement, de 0 à 2%, exclut toute récession, mais n’ annonce pas non plus de remontée franche. Cette petite reprise allemande est étayée par plusieurs chiffres : les offres d’ emploi non corrigées des variations saisonnières, qui avaient faibli de 243 000 au deuxième trimestre jusqu’à 221 000 au troisième trimestre, augmentent à nouveau à 238 000 en octobre et 245 000 en novembre. De même l’ indice des commandes nouvelles s’ est situé au troisième trimestre à un niveau nettement supérieur à celui du deuxième trimestre.
Il est vrai qu’ en sens contraire l’ Allemagne, comme les autres pays, connaît des difficultés dans la sidérurgie, dont la production est en régression, et se pose des questions pour l’ avenir de son industrie automobile. Comme aux Etats-Unis, c’ est l’ hésitation. Il y a cependant une différence importante entre les deux pays. Si le premier est relativement autonome et indépendant des échanges mondiaux, il n’ en est pas de même pour le deuxième, et c’ est ce qui rend son évolution plus fragile. C’ est la raison pour laquelle les cinq "sages" qui conseillent régulièrement le gouvernement allemand dans sa politique conjoncturelle, se départent un peu de leur prudence habituelle. Ils suggèrent, pour reprendre leur expression, un "programme de prévention pour une politique de croissance" comportant un coup d’ accélérateur et une injection de 3 milliards de deutschemarks pour stimuler un peu plus la demande interne.
L’ AUSTERITE
Cette précaution semble justifiée quand on examine le cas des trois autres pays faibles, Grande-Bretagne, l’ Italie et France, clients importants de l’ Allemagne. Ils sont empêtrés dans leurs plans d’ austérité et hésitent sur le dosage des mesures, alors que leurs taux d’ inflation grimpent à nouveau fortement ou refusent de redescendre de façon significative.
Prenons le cas du plan présenté le 15 décembre par M. Healey, chancelier de l’ Echiquier. Il illustre bien la difficulté qu’ il a à prendre des mesures de déflation
et à réduire fortement le déficit budgétaire. Car il faut se garder d’ aller trop vite sans compenser par des dépenses privées.
L’ Italie se trouve dans une situation voisine. Le plan Andreotti, pris dans l’ étau économique, a de la difficulté à se préciser et à s’ affirmer en dépit d’ un certain compromis social et politique. Et l’ austérité brusquement renforcée entraîne paradoxalement une accélération de l’ inflation par l’ intermédiaire des hausses considérables de tarifs publics. Cet effet s’ ajoute à celui que la chute de la lire fait déjà subir aux prix des produits importés et aux prix de gros. Cela explique la brusque escalade des prix que fait apparaître notre graphique.
Quant à la France, son plan Barre lancé en septembre arrive, en ce début 1977, à un passage difficile. L’ activité subit depuis l’ automne une sensible décélération, alors que simultanément les prix et les salaires augmentent encore fortement et que la balance commerciale continue à se dégrader. Cette dernière se retrouve même en octobre dans la plus mauvaise de couverture de 77% Tout cela s’ accompagne, pour des raisons diverses, politiques entre autres, d’ un pessimisme qui dépasse sensiblement les réalités. Il bloque l’ investissement et les initiatives, et risque en fin de compte... de se justifier lui-même. Le problème essentiel est donc de restaurer la confiance pour tenir jusqu’aux premiers bons résultats d’ un assainissement qui permettra ensuite à la France de recueillir plus facilement les fruits de la reprise des pays forts.
Cette reprise qu’ on peut en fin de compte espérer pour tous les pays s’ esquisse déjà pour les Etats-Unis et l’ Allemagne. L’ accentuer dépend probablement moins d’ une relance massive que d’ effort destinés à lever les freins qui se présentent.
D’ abord, pour les entreprises et les ménages, il y a l’ inquiétude devant l’ avenir, et la peur de s’ engager au-delà du court terme. On observe aussi une réticence générale à investir avec des taux intérêt qui restent encore élevés, alors que l’ inflation s’ abaisse. Cela est surtout vrai pour les pays faibles comme la France, coincée entre le souci de défendre le franc par un taux élevé de 10 à 11% et de relancer l’ investissement par un taux bas de 7 à 8% ajusté aux perspectives de prix. Mais des freins du même genre existent aussi, bien qu’ atténués, aux Etats-Unis et en Allemagne.
Par ailleurs, les pays dont les balances commerciales sont déjà mal en point sont encore plus menacés par les effets de la récente hausse pétrolière. Enfin, la difficulté d’ obtenir dans les échanges internationaux un rééquilibrage général des paiements (autre que celui, illusoire, qu’ avait provoqué en 1975 un recul des productions et des échanges) constitue encore un obstacle à la reprise de l’ activité.
Des solutions existent, que les gouvernements devraient s’ attacher, en ce seuil de 1977, à rechercher et à préciser, ensemble, avec patience.
Déjà, le mouvement est engagé aux Etats-Unis avec les baisses du prime rate de 6,5% à 6 1/4%, puis à 6%. Dans cette voie d’ autres initiatives devraient suivre pour redonner à l’ économie mondiale ce deuxième souffle dont tous les pays ont besoin, aussi bien les industrialisés que les producteurs de pétrole et ceux du tiers-monde.
+++ excellent
++ bon
+ assez bien
médiocre
— mauvais
— - très mauvais
+ tendance précédente
La croissance industrielle italienne est toujours en décélération et se retrouve à 7%. La croissance française qui, après son fort recul de février à janvier, s’ était maintenue entre 5% et 8% jusqu’en août, baisse à 2% en octobre. Mais le fait retrouver à ce pays un rythme de 5%. Même constatation mais plus atténuée, pour le taux anglais, qui se relève légèrement à 2%.
Le mouvement de remontée très forte de l’ inflation moyenne des quatre pays, qui s’ est amorcé il y a deux mois, s’ accélère à 13%. Il y a clivage entre la Grande-Bretagne, où le rythme des prix est de 18%, et l’ Italie, où il est de 20% d’ une part, et l’ Allemagne où il est d’ à peine 2% d’ autre part.
L’ inflation française, quant à elle, reste toujours bloquée à 11,5% sans redescendre.
Le taux de chômage anglais par rapport à la population active, corrigé des variations saisonnières, est toujours stable à 5,60%. En Allemagne et en France, les taux marquant depuis juillet - août un très léger recul, qui les fait passer en novembre de 4,60% à 4,45% pour le premier et de 3,30% à 4,95% pour le deuxième.
Le taux de couverture des importations par les exportations, calculé FOB-CAF et corrigé des variations saisonnières, de l’ Allemagne, après le creux de 106% d’ août, a retrouvé en septembre et en octobre son niveau élevé habituel de 120%. Le taux italien, lui, se maintient ferme à 85-90%. Le taux anglais, après une remontée régulière de 78% en juillet à 84% en octobre, recule à nouveau à 79% en novembre. C’ est surtout le taux français qui est préoccupant : depuis mai il recule sans arrêt, et se retrouve en octobre à 77%, dans la plus mauvaise position des quatre.
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