Des interviews exclusives de Dja-Apharou ISSA IBRAHIM, ami et confident de Jacques Baulin, responsable par donation de l’intégralité des documents constituant le fond, et président de l’association sont actuellement publiées dans la rubrique présentation.
Les trois ouvrages de J. Baulin : Conseiller du président Diori, La politique africaine d’Houphouët-Boigny et La politique intérieure d’Houphouët-Boigny
seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
2009.
Blé
TAIBOUT 59-58
50-40
13 BOUL. HAUSSMANN
PARIS IX e
LE DIRECTEUR
jb/dh
Lu par moi, en présence du Président Diori, à FHB, le 6.12.68 à la Villa du palais à 11 h.
le 5 décembre 1968
S.E. Monsieur Houphouët-Boigny
Président de la République de
Côte d’ Ivoire
Abidjan
Monsieur le Président,
Je tiens à vous remercier d’abord de ne m’avoir pas condamné sans m’entendre. Ceci dit, passons aux faits.
Les dons par le Canada de 20.000 tonnes de blé au Niger, et de 15.000 tonnes à la ôte d’ Ivoire n’auraient, en principe soulevé aucun remous, n’était le problème des honoraires des intermédiaires.
Je vais en expliquer donc ici la genèse et les conséquences.
Tout d’abord, je tiens à préciser que dans ce domaine délicat, je me serais pas permis de prendre, et je n’ai pas pris, d’initiative. Avant de donner mon accord, j’ai soumis le problème - en le qualifiant de " sordide " - au Président Diori et au ministre Bédié. LES DEUX M’ONT DONNÉ LEUR ACCORD, le Président verbalement, et Bédié par écrit .
Voilà comment les choses se sont passées avec le ministre Bédié :
1° - Au début de septembre dernier, j’ai vu le ministre des Affaires Économiques et Financières dans son cabinet à Abidjan. Je lui ai exposé qu’il y avait une possibilité d’obtenir du blé du Canada à titre de don. Il m’a répondu que ce serait le bienvenu, et qu’il serait même heureux
de pouvoir acheter du blé canadien pourvu qu’il puisse le payer sur plusieurs années, ce qui lui permettrait, chose urgente, d’avoir une certaine aisance de trésorerie. Et il ma demandé de poursuivre mes démarches " pour avoir une idée exacte des conditions " . ( voir ma lettre recommandée adressée à Bédié, document n° 1 ).
2° - Par ma lettre recommandée datée du 1er novembre 1968, je l’informais que je poursuivais mes démarches, que l’impact au Canada serait plus grand si nous pouvions y avoir un Consul Honoraire en la personne du vice-président du Parti Libéral, et je terminais en écrivant :
" il faudrait que je transmette tout le dossier à vos services, car mon rôle de mise en contact est près de s’achever ".
3° - Je repartais le 20 novembre pour Montréal, afin précisément, comme le ministre me le demandait, d’avoir une idée de ces " conditions ". Là, le groupe de mes amis canadiens prouvaient leur puissance
- en me faisant recevoir par Monsieur Trudeau, 12 heures après mon arrivée, sans que j’aie aucune lettre d’introduction,
- et surtout, le gendre de Monsieur Chevrier, à qui je venais de remettre les lettres du Président Diori le nommant Consul du Niger obtenait dans les 24 heures que les quantités de blé données au Niger soient DOUBLÉES, et que le paiement du fret pour les premières 10.000 tonnes soit à la charge d’ Ottawa.
Devant une telle manifestation de puissance de ce Groupe auprès du gouvernement canadien, j’aurais eu mauvaise grâce de rejeter toute idée de commission à l’homme d’affaires du groupe, Monsieur Chelton, quand il m’en a parlé. Ce que j’ai fait, c’est de discuter et de ramener de 15 à 10 % la commission demandée. je tiens à préciser ici que JAMAIS, les hommes politiques du Groupe ne m’ont parlé argent.
4° - Le samedi 23, au matin, à peine arrivé de Montréal, je téléphonais à Monsieur Belkiri pour lui demander de venir me voir de toute urgence. M. Belkiri ayant commis une faute de sécurité - il a parlé au téléphone de " francophonie " alors que vous-même m’aviez dit, six jours auparavant, à Cocody, de ne pas utiliser le téléphone et le télex surtout à ce sujet - je n’insistais pas et abandonnais l’idée de venir vous voir.
5° - Deux jours plus tard, donc le 25 novembre, je rencontrais le Président Diori et je lui remettais, entre autres, une note écrite sur ce problème des honoraires. Il me donnait, verbalement, son accord.
6° - Le lendemain, le mardi 26 novembre, j’allais voir Monsieur Bédié, à 16 h 30, à l’hôtel Commodore à Paris. Il était au lit. je lui expliquais toute l’affaire, en détails. Puis je lui ai lu la photocopie de la lettre que j’avais remise au Président Diori, en lui disant que j’allais vous la faire parvenir. Quand j’en suis arrivé au paragraphe concernant les commissions, i m’a dit textuellement : " Tu es un con, on n’écrit pas ces choses-là ". PUIS IL M’A DONNÉ SON ACCORD VERBAL.
7° - Bédié étant rentré à Abidjan le 27 novembre, et l’affaire pressant à cause du gel du St Laurent, je lui téléphonais le 28, vers 11 heures. Il me demandait alors de lui envoyer un télex, précisant les " conditions " du don. A 13 heures, je lui envoyais un long télex comme il me le demandait, et voici, entre autres, ce que j’écrivais ( voir document n° 2 ) :
" Comme exposé par moi lors de notre entrevue de l’hôtel Commodore les frais suivants seront à la charge du gouvernement ivoirien :
a. le fret plus l’assurance, soit environ 185.000 dollars,
b. les honoraires des intermédiaires, soit 110.000 dollars, réglable quinze jours après l’arrivée à Abidjan
8° - Quatre heures plus tard , Bédié m’envoyait le télex n° 200 que voici ( voir document n° 3 ) :
" Suite votre télex.... Honneur vous prier donner à titre officieux mon accord sur conditions réalisation. Mon accord définitif sera donné sitôt que gouvernement canadien m’aura notifié sa décision par toute voie officielle appropriée ".
Cet accord écrit du ministre Ivoirien des Affaires Économiques et Financières venant confirmer son accord verbal, je fonçais, à partir de ce moment, pour obtenir ce blé immédiatement.
Voilà les faits, document à l’appui.
ce n’est que plus tard que Bédié a commencé à m’envoyer des télex insultants et portant atteinte non seulement à ma dignité, mais à mon honneur.
Comme vous le voyez, Monsieur le Président, le ministre de l’ Économie m’a déconseillé de vous informer par écrit du problème des honoraires, et m’a donné ensuite, verbalement puis par écrit, son acceptation du versement de ces honoraires.
Où est ma responsabilité dans tout cela ?
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