Des interviews exclusives de Dja-Apharou ISSA IBRAHIM, ami et confident de Jacques Baulin, responsable par donation de l’intégralité des documents constituant le fond, et président de l’association sont actuellement publiées dans la rubrique présentation.
Les trois ouvrages de J. Baulin : Conseiller du président Diori, La politique africaine d’Houphouët-Boigny et La politique intérieure d’Houphouët-Boigny
seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
2009.
214 - 10.
CANADA
Volume 114 . Numéro 23 . 2 e Session . 28 e Législature
(Édition non revisée)
Présidence de l’honorable Lucien Lamoureux, Orateur
Imprimeur de la Reine pour le Canada, Ottawa, 1969
Prix, l’exemplaire, 5
(L’index quotidien des délibérations se trouve à la fin du présent numéro.)
La séance est ouverte à 2 heures.
LES AFFAIRES EXTÉRIEURES
[Français]
Le très bon, P. E. Trudeau (premier ministre) : Monsieur l’Orateur, plusieurs questions m’ont été posées à la chambre, ces derniers jours, au sujet des mesures prises par le gouvernement du Canada, en vue de collaborer à l’envoi de secours destiné aux populations civiles des régions sécessionnistes du Nigéria.
Étant donné qu’il est souhaitable d’exposer, dans une déclaration unique, les divers aspects des démarches faites à cet égard par le Canada, en voici un résumé chronologique :
[Traduction]
et New York et en ont encore à ces divers endroits, lorsque cela semble à propos. A mon avis, monsieur l’Orateur, c’est dans ce contexte qu’il faut envisager ma déclaration de la semaine dernière, alors que j’ai affirmé qu’il y avait eu des contacts au niveau ministériel. Ce contact a été établi à New York et, je le répète, il y en a eu d’autres à l’échelon officiel dans les diverses capitales
• (2.10 p.m.)
23_1969_
M. Bell : Quels braves types !
Des voix : Oh, oh !
Le très bon. M. Trudeau : L’opposition ne semble pas croire en l’opportunité des vols diurnes.
L’bon, M. Stanfield : Oui.
M. Bell : Mais nous ne vous croyons pas.
M. Woolliams : Vous lisez très bien, d’un ton un peu radouel.
Le très bon, M. Diefenbaker : Nous ne croyons pas aux alibis pour justifier des actes d’inhumanité.
Une voix : Gardez le sourire.
Le très bon, M. Trudeau : Vous pensez toujours aux chrétiens de là-bas,
M. Diefenbaker ?
Une voix : Vous ne connaissez même pas la procédure parlementaire.
M. l’Orateur : Puis-je rappeler au très bon.
premier ministre qu’on ne doit pas désigner un dépu é par son nom mais par le nom de sa circonscription.
Une voix : Il ne le sait pas.
Le très bon. M. Trudeau : 10. Une proposition de la Croix-Rouge relative aux vols diurnes a été remise le 1er août, à Genève, aux représentants des gouvernements nigérian et biafrais.
Le Biafra l’a acceptée en principe le 14 août, sous réserve de continuer de se servir de l’aéroport d’Uli pour ses opérations. Les Biafrais n’ont pas fait mine de vouloir accepter la seule demande nigériane , c’est-à-dire que des armes ne soient pas aéroportées en plein jour. Le document qui précisait les « modalités techniques » des vols de jour, rédigé par le professeur Freymond de la Commission internationale de la Croix-Rouge et le docteur Cookey du Biafra et diffué par les autorités biafraises, doit être interprété à la lumière de la condition posée par le Biafra.
Dans une déclaration remise à la presse le 15 septembre, elles ont exigé notamment l’assurance d’un tiers que le Nigeria ne retirerait aucun avantage militaire des vols de jour. La déclaration ajoutait que l’unique garantie acceptable par le Biafra est celle d’un tiers gouvernement ou d’un organisme international de caractère politique.
Ces pourparlers comportaient comme un élément de ces assurances une proposition selon laquelle des observateurs canadiens voyageraient dans les avions de secours.
[Le très bon. M. Trudeau.]
que le Biafra exige plus que des garanties militaires, que des garanties de caractère politique sont également nécessaires pour dénouer l’impasse.
Le gouvernement du Canada n’est pas disposé à accorder les garanties politiques exigées, car elles équivaudraient à la reconnaissance du Biafra comme État indépendant, et constitueraient une ingérence manifeste de la part du Canada dans les affaires politiques d’un autre pays, ce qui est contraire aux résolutions de l’Organisation de l’Unité africaine.
l’avais fais l’année dernière, j’ai parlé de ce problème avec le Secrétaire général U Thant.
Les dirigeants Canadiens ont étudié la question nigériane avec ceux de deux pays africains de passage à Ottawa cet automne.
Il s’agit du président du Niger M. Hamani Diori et du président de la Tanzanie, M. Nyerere .
L’avis unanime de ces chefs d’État africains est que les résolutions de l’Organisation de l’Unité africaine doivent être respectées.
Nous devons être résolus à faire parvenir des vivres
et des secours à ces gens, malgré la répugnance du régime du colonel Ojukwu à les accepter, sauf en retour d’avantages sur le plan politique.
L’bon, Robert L. Stanfield ( chef de l’opposition ) : Monsieur l’Orateur, en terminant sa déclaration, le premier ministre a porté un jugement très dur sur le colonel Ojukwu.
Nous ne sommes pas en mesure, ici à la Chambre, d’apprécier les fautes de ceux qui sont mêlés à cet affreux désastre. Mais nous sommes à même et c’est de notre devoir de juger le gouvernement et le premier ministre du Canada pour la façon dont nous nous sommes acquittés de nos obligations à cet égard.
Des voix : Bravo !
L’bon. M. Stanfield : Le premier ministre ne nous a absolument rien donné d’autre qu’un catalogue d’excuses à notre inaction.
Une voix : Quelle honte !
• ( 2.20 p.m. )
Des voix : Oh, oh !
L’bon. M. Stanfield : Le premier ministre et ses collègues du cabinet essaient d’échapper à l’accusation qu’ils méritent, parce que les Canadiens ont été profondément touchés par cette question.
Un gouvernement qui proclame la démocratie de participation ne peut rester indifférent à la réaction de la population.
Le public a démontré sans le moindre doute combien l’inaction gouvernementale le met en colère
Ne nous berçons pas d’illusions, monsieur l’Orateur, quant au but de la déclaration que le premier ministre
( M. Trudeau ) a faite aujourd’hui. Au cours d’une émission télévisée dimanche soir, des centaines de milliers de Canadiens ont pu constater que le premier ministre avait induit la Chambre en erreur dans une déclaration.
Des voix : Oh, oh !
L’bon. M. Stanfield : On avait demandé à la Chambre au premier ministre si des demandes avaient été récemment adressées au gouvernement du Canada, au nom de Canairelief , en vue de fournir à cet organisme une aide financière pour l’envoi de médicaments et de denrées alimentaires au Biafra. Le 17 novembre, comme en fait foi le hansard, à la page 874, le premier ministre a répondu :
Monsieur l’Orateur, je ne peux par parler de demandes récentes. Il se peut qu’il y en ait eu. Je l’ignore.
C’est un sujet qui revêt une grande importance, monsieur l’Orateur .
Si on le reconnaît, pourquoi le premier ministre n’a-t-il pas signalé nettement à la Chambre, à la première occasion qui lui était offerte, qu’une demande de ce genre avait été reçue de Canairelief ?
Même dans sa longue déclaration d’aujourd’hui, il n’a pas dévoilé si Canairelief avait fait une telle demande. Monsieur l’Orateur, nous admettons tous que les vols de jour seraient très souhaitables et très satisfaisants.
Le premier ministre a dit que l’idée venait du gouvernement du Canada. J’en doute beaucoup, mais je ne prends pas la parole pour discuter de cela.
Une voix : Vous avez bon coeur. Vous êtes magnanime.
L’bon. M. Stanfield : Je demande au premier ministre de dire un jour à la Chambre quelles
sont les conditions d’ordre politique que le gouvernement du Biafra a liées à l’attitude qu’il a récemment adoptée à l’égard des vols de
jour. Quelles sont ces conditions ? Pendant longtemps, par ses actes à l’égard du Biafra, le gouvernement du Canada a montré qu’il voulait gagner du temps, et il refusait de s’entretenir avec quiconque était associé au Biafra. Le professeur Head, représentant personnel du premier ministre, que je sache, ne l’a jamais fait, certainement pas lorsqu’il était là-bas . Après sa désignation par le président Nixon, le professeur Ferguson a eu des entretiens avec les Biafrais et il a essayé de conclure les arrangements nécessaires. Je l’admets,
monsieur l’Orateur, nous voulons que des dispositions soient prises pour les vols de jour.Le premier ministre jette tout le blâme sur le colonel Ojukwu, chef du gouvernement du Biafra.
Des voix : Honte !
L’bon. M. Stanfield : Je doute que ce soit aussi simple que cela. que le premier ministre nous dise pourquoi le gouvernement du Canada n’est pas disposé à faire ce qu’il peut.
Pourquoi refuse-t-il d’aider Canairelief, qui a secouru et continue de secourir considérablement les Biafrais affamés ? Pourquoi , monsieur l’Orateur ? Le gouvernement a refusé deux demandes de Canairelief .
Je crois comprendre que la plus récente n’a pas encore reçu de réponse. Pourquoi ?
Le premier ministre a accusé le colonel Ojukwu d’indifférence envers les vols de jour et l’aide qu’ils pourraient permettre. Le premier ministre fait preuve d’entêtement pour ce qui est des secours que pourraient apporter les vols de nuit.
Pendant plus de 16 mois les Canadiens, les partis d’opposition
et bien des organismes privés à l’étranger ont tenté de persuader le gouvernement d’agir. Je ne vais pas reprendre l’affaire à partir du début comme le premier ministre l’a fait dans sa déclaration ; ce n’est pas nécessaire. Nous avons essayé de pousser le gouvernement du Canada à protester contre les envois d’armes en provenance du Royaume-Uni et d’autres pays, mais le gouvernement a refusé .
D’après des informations récentes, la Grande-Bretagne va accroître les expéditions d’armes. Nous avons demandé au gouvernement d’appuyer les premiers efforts de l’administration Nixon aux États-Unis
à ses débuts, mais le gouvernement a refusé. Nous lui avons demandé de contribuer aux efforts de Canairelief . Une fois de plus le gouvernement a refusé. Canairelief a surtout obtenu de l’aide du gouvernement des États-unis ; elle a reçu $750,000 environ, sans lesquels il lui aurait été impossible de poursuivre ses opérations de sauvetage. Maintenant il semble que le gouvernement des États-Unis supprimera vraisemblablement son aide à Canairelief parce que le gouvernement canadien n’accorde pas son appui à ses propres citoyens qui envoient nourriture et médicaments aux victimes de la guerre.
Des voix : Quelle honte !
L’bon. M. Stanfield : Les canadiens sont plus que jamais émus de l’entêtement du premier ministre que je qualifierais d’impitoyable - je
ne l’accuserai pas d’indifférence- devant l’une des plus grandes tragédies humaines de notre époque . Peu après l’arrivée au pouvoir de l’administration Nixon, qui a commencé à prendre certaines initiatives dans ce domaine , nous avons exhorté le gouvernement canadien à appuyer ces mesures, mais le gouvernement a refusé de la faire jusqu’au 12 novembre, lorsque le secrétaire d’État américain a semblé suggérer dans une déclaration que le gouvernement américain se désintéressait du problème. Puis, le gouvernement du Canada s’est vaillamment rangé du côté de Washington.
Sauf erreur, environ 1,500,000 personnes sont mortes de faim depuis le début de 1968, et il y a en a peut-être 2,000 qui meurent encore chaque jour. Il nous faut agir . Que le premier ministre et ses collègues
prennent les mesures voulues pour aider Canairelief à transporter des approvisionnements dans ce pays la nuit ; qu’ils fournissent cette assistance au lieu de se présenter à la Chambre avec une longue déclaration destinée à justifier la situation et à permettre au gouvernement canadien de ne pas s’acquitter de ses obligations humanitaires.
Le premier ministre a exprimé un jugement sévère sur le colonel Ojukwu ; le peuple Canadien jugera sévèrement le premier ministre pour avoir été incapable d’agir dans un domaine où le Canada pouvait apporter son aide, celui des vols de nuit, et je supplie le premier ministre de prendre rapidement des mesures pour que cette aide importante soit apportée.
Des voix : Bravo !
M. Andrew Brewin (Greenwood) : Monsieur l’Orateur, jamais encore je n’ai écouté dans cette Chambre de déclaration faite par le premier ministre actuel ou un de ses prédécesseurs, qui ait suscité en moi plus d’affliction ou de regret que les propos que nous venons d’entendre.
Cette déclaration néanmoins a un aspect auquel je pourrais souscrire : il est évident que le premier ministre à pris conscience de la profonde angoisse du peuple canadien
[L’bon. M. Stanfield.]
devant l’ampleur de ce drame humain qui a déjà emporté un ou deux millions de vies et qui risque de se solder par un véritable génocide.
Ce que je trouve tellement regrettable dans cette déclaration prolixe
et évasive, c’est, comme l’a souligné le chef de l’opposition, qu’elle n’aborde pas la seule possibilité qui, parmi les différentes solutions possibles, s’impose à nous : notre assistance devrait manifestement avoir pour point de départ l’opération qui, en dépit des dangers et des difficultés, est actuellement en cours grâce à l’initiative de la Church Aid conjointe, et à laquelle Canairelief a apporté un concours tellement considérable et tellement héroïque.
● (2.30 p.m. )
Pourquoi néglige-t-on cette voie de secours ?
On dit que le colonel Ojukwu devrait plutôt accepter les vols de secours diurnes. Le premier ministre sait-il-si oui, il ne l’a pas montré -que la Croix-Rouge internationale, dans son projet, ne prévoit que la livraison de quelque 90 tonnes de fournitures sur une période de trois semaines, sous la surveillance de l’armée et de l’aviation nigérianes ?
Canairelief est un organisme bénévole -je ne devrais pas en parler exclusivement, car à l’entreprise participent d’autres organismes bénévoles qui se sont réunis pour aider l’Église-qui apporte chaque nuit par avion 200 tonnes de fournitures. Demande-t-on au colonel Ojukwu ou à quelqu’un d’autre d’accepter un programme de trois semaines, si altéré soit-il, qui engloberait une bien moindre quantité d’approvisionnement ?
Est-ce que cela va aider les gens du colonel Ojukwu ? C’est ce que pense le premier ministre. Il est ridicule de prétendre qu’il est impossible d’y parvenir sans entorses au protocole ou sans se mêler des affaires d’un autre pays. En juridiction internationale, le droit d’intervention humaine a été reconnu depuis des siècles,
et il est encore reconnu sans ambiguïté par les autorités en ce domaine.
Le facteur le plus important a déjà été précisé par le chef de l’opposition qui a souligné que les opérations de Canairelief ont été indirectement appuyées par le gouvernement des États-Unis qui a versé $800,000 a des organismes religieux . Le gouvernement des États-Unis peut aider les organismes religieux à faire le travail, ils sont les seuls qui soulagent la famine. Pourquoi le gouvernement du Canada ne peut-il faire de même ?
De nombreux Canadiens ont présenté des demandes pressantes à cet effet.
Des discussions longues et approfondies ont eu lieu au sujet des vols de jour et j’ai constaté d’importantes omissions dans la déclaration du premier ministre. Il a parlé d’un document qu’il ne reconnaissait pas comme un accord. Hier, le secrétaire d’État aux Affaires extérieures (M. Sharp) a dit que la seule entente avait été conclue avec le Nigéria. J’ai en main ce qui est censé être la copie d’un accord conclu entre les services de la Croix-Rouge et les autorités biafraises le 27 août 196, où l’on prévoit tous les détails relatifs aux vols diurnes. L’affirmation, faite avec une telle négligence, que le colonel Ojukwu a refusé d’autoriser les vols de jour ne concorde pas avec les faits.
Après la signature de l’accord, la Croix-Rouge s’est adressée au gouvernement nigérian et elle a obtenu un autre accord. Quels en sont les termes ? Voici le paragraphe 4 :
Les routes suivies en direction ou en provenance d’Uli, les indicatifs d’appel, les messages radio, les emblèmes, les genres d’avions et les plans de vol devront correspondre aux conditions dont conviendront de temps à autre la CICR, et l’aviation
et l’armée nigériane.
N’est-il pas parfaitement clair que c’est là demander aux autorités du Biafra de signer, peut-être, leur propre certificat de décès ? C’est certainement leur demander de se rendre. Qu’est-ce que l’entente prévoit encore ? Le premier ministre a relevé que le colonel Ojukwu demande, dans ses propositions, qu’on tienne compte de certaines considérations militaires. Le paragraphe 6.2 de ce projet d’entente entre la Croix-Rouge internationale et le gouvernement fédéral du Nigéria stipule ce qui suit :
L’entente ne doit causer aucun préjudice aux opérations militaires menées par le gouvernement militaire fédéral.
Les deux parties se servent peut-être de la propagande dans ce conflit, monsieur l’Orateur, et cela n’a rien d’étonnant. Les Biafrais
mènent une guerre de survivance et il n’est pas raisonnable de croire qu’ils accepteront des mesures susceptibles de les conduire à la défaite militaire.
Mais, dans cette affaire, la propagande n’est pas à l’oeuvre dans un seul des camps en présence. Dés le mois de janvier dernier, le général Alexander, membre d’un groupe d’observateurs au Nigéria, a fait état, selon « The Economist » du 11 janvier, d’un plan pour le Nigéria mis au point de concert avec le gouvernement britannique, et qui visait à proposer certaines mesures d’assistance que les autorités biafraises ne pourraient pas accepter pour des raisons militaires, et Qui seraient susceptibles d’être mises en avant ensuite pour les besoins de la propagande en faisant retomber sur le colonel Ojukwu la responsabilité de la famine au Biafra. C’est précisément ce qui s’est passé. En vérité, il me semble que, lorsqu’ils parlent de propagande,
le premier ministre et ses collaborateurs sont les victimes de la propagande nigériane et, dans ce cas particulier, de la propagande britannique, je suis au regret d’avoir à le dire.
Au nom de l’humanité, l’implore le gouvernement de montrer suffisamment de grandeur d’âme pour examiner une nouvelle fois les données de ce problème. De temps en temps, le gouvernement nous a déclaré que les efforts déployés par lui en vue d’aider la Croix-Rouge internationale se sont révélés vains et qu’il va déterminer d’autres voies et d’autres façons d’aborder le problème . Aussi, en terminant, je voudrais exhorter le premier ministre et le gouvernement à entendre la voix du peuple canadien et à appuyer le seul organisme luttant contre la famine au Biafra.
D’une initiative de ce genre dépendent les vies de centaines de milliers d’êtres et il n’y a aucune raison valable de ne pas la prendre.
Je pense que le peuple canadien souhaite que cette initiative soit prise.
[ Français ]
M. Réal Caouette (Témiscamingue) :
Monsieur l’Orateur, nous avons écouté avec beaucoup d’attention la déclaration en 18 points du très honorable premier ministre (M. Trudeau), relativement à la situation tragique qui existe au Nigéria
et au Biafra.
Monsieur l’Orateur, on ne remédiera pas à cette situation délicate, sérieuse et très complexe en faisant des miracles. Par ailleurs, le très honorable premier ministre ne propose pas de solution précise. A mon avis , il ne peut faire un miracle pour régler cette situation, pas plus d’ailleurs que le chef de l’opposition (M. Stanfield), qui blâme le gouvernement de ne rien faire mais qui se garde bien de proposer une solution concrète, ou, encore, le député du Nouveau parti démocratique, qui vient de parler de la grande tragédie humaine qui se joue au Biafra.
Monsieur l’Orateur, nous, les créditistes, faisons aussi partie de l’opposition et nous croyons sincèrement qu’un des 18 points dont on vient de traiter à la Chambre des communes repose tout de même sur des faits, sur des recherches qui ont été faites. Ce n’est pas dans le but de flatter le premier ministre ou le gouvernement que je le dis, mais bien parce que certains points se rattachent à des faits.
De hauts fonctionnaires canadiens se sont rendus sur les lieux non pas dans le but de faire une partie de plaisir, mais d’observer ce qui se produit. Ils ont étudié la situation et rencontré les représentants des parties en présence. Ils se sont également rendus en Angleterre pour rencontrer les autorités du Nigéria. Quant aux canadiens, quels qu’ils soient, qui sont allés au Nigéria, ils ont discuté des problèmes avec lesquels ce pays est aux prises.
Lorsque le Nigéria ou le Biafra pose des conditions relativement à l’envoi de secours par le Canada, qu’il s’agisse de médicaments, de nourriture, de vêtements, de soins médicaux, etc., il me semble qu’on devrait, à la Chambre des communes, cesser de s’entretuer comme le font actuellement le chef de l’opposition et le porte-parole du Nouveau parti démocratique.
On ne peut taper toujours, et je le dis sans ambages : si le chef de l’opposition était à la place du premier ministre actuel et nous disait ce qu’il ferait dans ces circonstances, nous l’écouterions avec attention.
Personne plus que nous ne désire venir en aide à ceux qui sont dans la misère et qui se font massacrer au Nigéria et au Biafra. Mais il faut tout de même faire preuve de réalisme et examiner froidement les possibilités qui nous sont offertes de les aider . Nous demandons aux parties en cause , par l’entremise de la Croix-Rouge, de nous permettre de les aider, et elles ne veulent même pas en entendre parler. Allons-nous à la Chambre des communes du Canada, décider de l’avenir du Biafra ? Soyons donc logiques et conséquents avec nous-mêmes. J’entends le député d’York-Sud (M. Lewis)
« yapyapper ». C’est tout ce qu’il peut faire à la Chambre des communes. D’ailleurs, il le fait aussi à l’extérieur.
Aucun député, sauf peut-être le député d’York-Sud, ne peut me dire qu’il est plus désireux que nous de régler le problème du Nigéria ou du Biafra. Nous voulons apporter notre aide. Toutefois, ce n’est pas, comme je le disais tantôt, en nous entre-tuant que nous allons régler ce problème-là.
Examinons les solutions, au lieu simplement de dire au premier ministre : Vous faites erreur, vous n’avez pas de solution à proposer, vous êtes arrogant à l’égard du Biafra, vous ne voulez pas vous engager à fournir votre aide ! Pourquoi ne propose-t-on pas au gouvernement des solutions logiques, raisonnables et véritablement humaines qui aideraient le Parlement et le peuple canadien à régler la situation désastreuse qui existe au Nigéria et au Biafra ?
Nous sommes d’avis qu’il est possible de travailler objectivement en proposant des solutions et en demandant l’aide de ceux qui sont directement responsables. Si le colonel d’un certain pays refuse d’accepter notre aide et de collaborer, comment nous sera-t-il possible d’agir ?
On nous demande d’intervenir dans les affaires d’un autre pays, et de prendre position en faveur d’une partie ou de l’autre, au point de vue politique. Si ces gens responsables ne cherchent qu’à sauver leur peau politique, il est temps, pour ces peuples, de se trouver d’autres chefs qui s’entendront mieux avec tous les autres chefs d’État.
[M. Brewin.]
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