Des interviews exclusives de Dja-Apharou ISSA IBRAHIM, ami et confident de Jacques Baulin, responsable par donation de l’intégralité des documents constituant le fond, et président de l’association sont actuellement publiées dans la rubrique présentation.
Les trois ouvrages de J. Baulin : Conseiller du président Diori, La politique africaine d’Houphouët-Boigny et La politique intérieure d’Houphouët-Boigny
seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
2009.
Abidjan, 11 décembre 1969
Cher Monsieur Baulin,
Je viens d’avoir des renseignements de première main sur les troubles qui ensanglantent la région d’Aboisso, et je veux vous communiquer immédiatement ce que j’en sais car cela est typique d’une certaine situation et peut être lourd de menaces pour l’avenir. ( Ton informateur est un ami Ivoirien dont le père a une grosse plantation dans la région ).
Aboisso et Ayamé , sur la frontière de Ghana sont en zone agni. Depuis plusieurs mois un agitateur, chef coutumier, a peu à peu investi de son autorité la région. L’origine du conflit avec le pouvoir est assez folklorique apparemment. En effet cette population a reçu de Louis XIV ( sic ) un statut de suzeraineté qui lui permet selon elle d’être indépendante de toute forme d’Etat. Et ce chef coutumier se considère comme souverain dans sa région . . Il a réussi par infiltration successives à convaincre de ses droits un assez vaste territoire qui s’étend sur une bonne partie de la frontière ghanéenne. Tout cela s’est répandu progressivement et le conflit ouvet a éclaté depuis quelques semaines, prenant maintenant un tour tragique. Un P. C. clandestin fonctionne, soutenu financièrement par les chefs de village qui soutirent de l’argent par la contrainte des habitants. Et le Nigéria fournirait une aide assez mal défini dans sa nature . . .
La répression est incroyablement dure. La quasi totalité de la région est encadrée par la troupe, les prisons d’Aboisso et Ayamé sont pleines, et au hasard des dénonciations, sont arrêtées des personnes que l’on installe dans des camps en pleine brousse. On a fait tondre tous les prisonniers , et en particulier un très grand nombre de femmes, lesquels on fait défiler tous les matins à 6 heures à travers les villages et les villes pour demander pardon aux autorités (sous préfet , maires . . . ) En particulier de nombreux chefs de plantation ont été arrêtés,
et il est ordonné de laisser les plantations à l’abandon ( ce qui est d’autant plus grave que c’est la saisons de la traite )
x et à retourner
A Abidjan on parle de plus en plus de cette affaire. Il y aurait déjà pas mal de morts. On raconte des scènes particulièrement atroces ( flagellations, etc . . . ) Surtout de raser femmes et hommes a beaucoup marqué. Et tout cela entretient le climat de fermentation qui sévit ici.
Au lycée un calme approximatif est revenu. Les élèves meneurs ont fait, comme je vous l’ai écrit, une autocritique publique . . . Seulement à la fin de la cérémonie une camionette bâchée s’est approchée des élèves et deux policiers en civil ont kidnappé le leader N° I
Aussitôt se sont lancée à ses trousses quelques voitures de professeurs et de parents d’élèves, et la poursuite s’est achevée par la libération de notre . . . martyr, car vous devez bien penser le regain de popularité que notre révolutionnaire a gagné après une pareille aventure !
Je vous envoie toutes mes amicales pensées,
x il y a également de nombreuses arrestations a Abidjan.
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