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C-023-002 - NOTES - classeur C - Fonds d'archives Baulin

C-023-002

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  • Des interviews exclusives de Dja-Apharou ISSA IBRAHIM, ami et confident de Jacques Baulin, responsable par donation de l’intégralité des documents constituant le fond, et président de l’association sont actuellement publiées dans la rubrique présentation.

  • Les trois ouvrages de J. Baulin : Conseiller du président Diori, La politique africaine d’Houphouët-Boigny et La politique intérieure d’Houphouët-Boigny
    seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
    2009.


Afrika Forum
Avril 1969


illisible


voici quelques semaines, les premières assises de la francophonie assemblé à Niamey confirmaient une nouvelle fois l’importance prise par le Niger au sud du Sahara. Depuis la Conférence de l’ Organisation commune Africaine et Malgache -OCAM- tenue dans la capitale en janvier 1968, et sa réélection à cette date un président en exercice de l’association, M. Diori Hamani ne cesse pas d’étendre son audience hors de ses frontières , la réunion chez lui des États de langue française constituait donc pour sa diplomatie un succè
encourageant. Malgré tout sont éclat, cette réussite ne parvint pas à le distraire des soucis causés par une situation intérieure embarassante. Durant la rencontre francophone, les préoccupations officielles allèrent souvent vers le Nord-Est de la République où règne une angoisse préoccupante.


Depuis plusieurs mois, cette région naturellement pauvre subit de dures épreuves. En raison d’une sècheresse exceptionnelle, en Mai dernier, prés de 100.000 bêtes sont mortes depuis lors sur les pâturages calcinés par la chaleur. Or les troupeaux aujourd’hui décimés représentaient souvent l’unique richesse des pasteurs nomades, nombreux autour d’Agadès. La grande ville.de.l’AÏR, naguère si vivante, offre maintenant le spectacle d’une cité morte, où la valeur marchande des animaux exténués diminue sans cesses et réduit les transactions commerciales à néant. La production de mil, fortement atteinte elle aussi, laisse les habitants sans réserves suffisantes jusqu’à la prochaine récolte. Le risque de famine n’existe pas à proprement parler, mais la gêne alimentaire peut devenir très inquiétante d’ici l’été. Enfin le guerre du Biafra frappe durement les échanges traditionnels entre les deux pays. Naguère deuxième client et deuxième fournisseur de la Fédération, , le Niger n’exporte plus qu’avec peine son bétail et son poisson séché vers le Sud. Les pertes se chiffres par plusieurs milliards.


Dans ces circonstances, la perception de l’impôt menace d’être difficile. En zone nomade, l’administration taxe les contribuables d’après la richesse du cheptel. Mais l’hécatombe rend cette année l’évaluation très délicate. bien des villages figurent sur les rôles pour un nombre de vaches dont ils ne garde pas l’ombre, et paieront leurs redevances avec beaucoup de mal. Or le Gouvernement a besoin d’argent. Pour en obtenir, certains fonctionnaires peuvent céder à la tentation de prendre des mesures extrêmes, exiger le règlement fiscal d’après les anciens calculs, sans tenir compte du changement intervenu dans les fortunes. Une telle rigueur entraînerait des conséquences graves chez les touaregs, demeurés loyaux envers l’ État pour la modération de ses exigences financières. Afin de prévenir tout mouvement d’impatience, il faudrait sans doute réduire les charges publique au minimum, et accroître dans des proportions inverses les livraisons alimentaires aux territoires victimes de la sècheresse. Malheureusement, une telle procédure exige des fonds, et le Ministère des Finances n’en a pas.


Face à cette situation dangereuse, le Parti Progressiste au pouvoir depuis dix ans montre une étrange apathie. Ses responsable régionaux souvent viéllis
dans les honneurs ne possèdent plus le dynamisme, l’imagination nécessaire en de telles circonstances. Beaucoup d’entre eux exercent une autorité abusive jusque sur les préfets et jouissent des avantages acquis sans songer au lendemain. Si le Président reste personnellement toujours très populaire, certains de ses Ministres suscitent la critique par leur légèreté ou leur mollesse. Certes , il ne s’agit pas là d’un phénomène vraiment nouveau. Mais dans une période épineuse, il entretient l’insatisfaction. La menace de disette dans le Nord-Est ne constitue pas seulement un problème rural. Les habitants des régions dévastées par la sécheresse envoient souvent quelques cousins travailler dans les villes. La solidarité familiale reste vive en Afrique. A Niamey, Maradi, Zinder, les gens connaissent la gêne des parents demeurés en brousse, auquel ils expédient du mil ou un peu d’argent dans la limite de leurs moyens. Aussi supportent-ils moins bien l’insuffisance de certains responsables et l’incurie des services.


Une pièce de théâtre intitulé Mariama , jouée depuis plusieurs semaines à Niamey avec succé traduit sans ménagement cette irritation. Au cours de l’histoire, un fonctionnaire consciencieux menacé de licenciement jette à son Directeur coupable de négligence et de népotisme : "Avec la possibilité de recruter qui vous voulez, abandonnant ainsi le service à un favoritisme à peine voilé, le pouvoir de vous débarrasser de qui vous voulez est également une de vos prérogatives. Usez-en autant que vous pouvez. Mon départ vous

donnera certainement l’occasion de faire assoir à ma place votre petite cousine ou une petite amie ou tout autre protégé dont vous voudrez vous encombrez. Mais attention cela ne durera qu’un temps... Révolutionnaire, moi ! je sens que je suis en train d’en devenir un... Des agents les plus tranquilles vous êtes en train de faire des enragés. Et tout cela par maladresse, par insuffisance, par vanité et par esprit de subversion. Car il faut appeler les choses par leur nom. La subversion se réfugie aujourd’hui dans notre administration. Vous, chefs de service, Directeurs et autres responsables parvenus, vous êtes en train de ruiner l’édifice de l’État ..."


Ces propos subversifs, salués chaque soir par des applaudissements, bénéficient d’ailleurs d’un discret patronage officiel. Certains collaborateurs du Président Diori soutiennent Mariama parce qu’ils estiment urgent de procéder à une épuration politique et administrative capable de rendre toute sa vigueur au régime. En Août dernier, le Premier Nigérien lui-même avait prononcé un discours fort énergique dans ce sens. Ses nombreux déplacements à l’extérieur, la sourde résistance des cadres menacés ne permirent pas d’entreprendre le réforme. Elle s’avère nécessairement difficile dans un pays pauvre en élites modernes. Les plus actifs partisants de l’ordre établi n’en croient pa moins qu’en des circonstances où le peuple attend beaucoup de ses chefs, la sévérité servirait le Gouvernement.


Mr Diori Hamani hésite peut-être à engager l’épreuve de force par peur de ses répercussions possible dans l’ancienne métropole. Extérieurement, les rapports entre Paris et Niamey demeurent excellents. En réalité, les contacts économiques pris par le Président en Belgique, en Hollande, en Allemagne, au Canada irritent beaucoup certains milieux d’affaires français, enclins à considérer le territoire comme une chase gardée. Depuis quelques semaines, ce mécontentement s’exprime à travers les rumeurs malveillantes reprise contre lui jusqu’aux abords des bureaux où s’élabore la politique africaine du gaullisme. En principe, ils n’iraient pas jusqu’à soutenir des Nigériens contre leur Président. Mais quelque agents de la V° République engagés dans d’innombrables intrigues au Sud du Sahara témoignent d’une redoutable aptitude à jouer avec le feu. Leur action acuelle au Biafra montre assez l’étendue de leur influence. Or l’ hostilité de M. Diori Hamani à la sécession d’ Ojukwu constitue aussi pour eux un sujet d’exaspération.


Leurs exigences correspondent d’ailleurs à l’évolution générale du continent Noir. Voici dix ans, la France devait choisir un peu partout entre des partenaires diversement disposés à son égard. Au Niger, elle opta sans hésiter pour ses amis du Parti Progressiste contre les révolutionnaires. Mais l’affaiblissement continental de la incarné par Mr. N’krumah ou Modibo Keita transforme les conditions de jeu. Dans une

Afrique presque entièrement dirigés par des hommes raisonnables, le tri ne s’opère plus entre extrémistes ou modérés, mais entre Présidents plus ou moins dociles aux injonctions parisiennes. Par sa personnalité, son sens de l’ État, le Président Diori Hamani s’oppose aux manipulations. Il ne manque pas de gens sur les bords de la Seine pour lui en vouloir. Fort heureusement, il possède aussi beaucoup d’amis dans le personnel dirigeant actuel de prévenir une intrigue inconsidérée. Malgré tout, cette situation complexe ne l’engage certainement pas à prendre trop de risques à la fois si les difficultés interne peuvent se prolonger au dehors.


Dans cette circonstance, les rapports de force importent énormément Les récentes avances faites au Niger par le Gouvernement d’ Ottawa causèrent quelque inquiétude à Paris. Sous prétexte de francophonie, les Canadiens n’allaient-ils pas mener une politique plus active au sud du Sahara, et fournir des atouts supplémentaires à m. Diori Hamani ? En fait ces craintes surestimaient les moyens de M. Trudeau. Le chef du Gouvernement Fédéral s’intéresse personnellement à l’Afrique. Mais les Ministères D’Ottawa peuplés de fonctionnaires Britaniques entravent son action, car ils se soucient peu d’envoyer des assistants et des crédits dans un territoire de langue française comme le Niger. Cette répugnance rassure les responsables gaullistes et simplifie leur propre jeu. En attendant, M. Diori Hamani s’apprète à affronter une année difficile. Sa détermination, l’appui d’un peuple encore prêt à le suivre, la fidélité des meilleurs éléments du pays lui donnent d’ailleurs de bons atouts pour surmonter l’épreuve.


G.C.

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